SÉRIE NOIRE

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Pas la peine d'aller chercher très loin, le caractère exceptionnel de ce film tient en deux mots: Patrick Dewaere. En ces années 78-79, il a à peine plus de 30 ans et il ne lui en reste que 4 à vivre. Il met ici toute sa nervosité et toute sa fragilité psy au service d'un personnage, Frank Poupard, qu'on n'oublie plus jamais une fois qu'on a fait sa connaissance. Un drôle de type qui joue tout seul aux gendarmes et aux voleurs dans les terrains vagues. Un type fêlé qui se tape volontiers la tête contre le capot de sa Simca break et qui danse sur des airs de Duke Ellington quand le reste du monde dit "civilisé" tente d'oublier sa misère dans une variété de pacotille.

Il faut dire aussi que l'orchestre qui accompagne le soliste n'est pas mal : Alain Corneau à la baguette, Jim Thompson et Georges Perec à la partition, Bernard Blier et Marie Trintignant aux seconds violons. C'est d'ailleurs dans ce rôle, quasi muet et parfois intégralement nu, que la petite Marie, alors agée de 16 ans, s'est fait un prénom.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver BUFFET FROID ou encore COUP DE TÊTE .

Voilà un film qui donne envie d'en voir tellement d'autres qu'on ne sait par où commencer... Du coup, commençons par la musique: celle qui accompagne Dewaere dans ces terrains vagues de la banlieue de Créteil est signée Duke Ellington et Juan Tizol, vénérable tandem à qui on doit par ailleurs un des standards les plus repris de l'histoire du jazz: Caravan. Le morceau d'ici s'intitule Moonlight Fiesta.

Pour revenir à des considérations plus cinématographiques, on piochera volontiers dans la filmo de Dewaere pour le revoir jouer au foot dans Coup de tête, de Jean-Jacques Annaud, ou dans deux films révolutionnaires de Bertrand Blier: Les Valseuses et Préparez vos mouchoirs. Personnellement, c'est dans Le Poulet que je le préfère, en tandem de flics avec Lino Ventura.

Et pour revenir à la famille Blier, c'est l'occasion de rappeler qu'en cette même année 79, le père Bernard et le fils Bertrand vont signer leur chef d'oeuvre en commun: l'inoubliable Buffet froid, tourné, comme on se retrouve, dans une autre banlieue en chantier, celle de La Défense.

N'oublions pas enfin de saluer l'auteur du roman noir original, Jim Thompson, ecrivain américain qu'on retrouve au générique de deux films de Kubrick, L'Ultime Razzia et Les Sentiers de la gloire, ainsi qu'à l'origine du Guet-Apens, de Peckinpah et des Arnaqueurs de Stephen Frears. Sans oublier, en 81, Coup de torchon de Bertrand Tavernier, avec Eddy Mitchell et Philippe Noiret.