Avant de passer à la réalisation de fiction, Annie Silverstein travaillait dans le social, et notamment au contact d’adolescents, issus de milieux ruraux ou très pauvres, et dont beaucoup souffraient de l’absence de parents incarcérés. Elle déménage au Texas en 2010 afin de faire des études de cinéma, elle qui avait notamment réalisé quelques documentaires. En 2014, elle met en scène Skunk, un court métrage où une jeune fille se fait voler son pitbull par un organisateur de combats de chiens. Le court, dit-elle, n’est pas une inspiration directe de Bull, même si les deux films commencent tous les deux par l’image d’un animal mort dans la cour d’une maison – un putois pour Skunk, un poulet pour Bull. Skunk permet à Annie Silverstein d’intégrer la Cinéfondation cannoise en 2014, dénicheuse de talents du monde entier qui propose aussi une résidence et une aide à l’écriture.
C’est ainsi que Bull, premier long métrage d’Annie Silverstein, déniché par le Festival de Cannes, s’est retrouvé en sélection officielle du plus grand festival du monde en 2019, dans la section Un Certain Regard. Cette année-là, plusieurs cinéastes femmes américaines se sont illustrées avec des premiers films, comme Danielle Lessovitz avec son Port Authority, Annabelle Attanasio et son Mickey and the Bear sélectionné à l’ACID ou encore Pippa Bianco et son Share, présenté hors compétition. Plusieurs semaines après Cannes, Bull fait sensation au Festival du film américain de Deauville où il rafle le Grand Prix, le Prix de la critique et le Prix fondation Louis Roederer de la Révélation. Acquis par Sony aux États-Unis et en France, Bull ne passera malheureusement pas par les salles de cinéma chez nous.
De son passif dans le social et le documentaire, Annie Silverstein a gardé le goût de l’authenticité. « Ce qui m’intéresse c’est de raconter des histoires sur l’Amérique que je vois, et dont je fais l’expérience au quotidien, dit-elle. Je ne connaissais rien des cow-boys noirs. On ne nous a pas appris ça à l’école et ce n’est pas représentatif de l’imagerie de Grand Ouest. Les cow-boys noirs sont les vrais premiers cow-boys. Cela date de l’esclavage. À cette époque, c’étaient les esclaves qui s’occupaient des ranchs. Après l’abolition, le rodéo est devenu un sport auquel les Noirs n’avaient pas le droit de participer. Alors, des rodéos ont été organisés par les communautés noires elles-mêmes, pour garder en vie cette tradition. » Désormais,
Bull imprime cette vérité sur pellicule.