PORTRAIT OF JASON en VOD
- De
- 2014
- 103 mn
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- Documentaire
- Etats-Unis
- Tous publics
- VO
Réalisé par
PARCE QUE
Shirley Clarke a commencé à réaliser des documentaires dans les années 50, avant de devenir célèbre pour son fim The Connection (1961) sur un groupe de musiciens de jazz attendant l’arrivée de leur dealer d’héroïne. Portrait of Jason est le résultat d’une interview de douze heures réalisée au cours d’une nuit dans l’appartement de la cinéaste à l’hôtel Chelsea, rendu fameux trois mois plus tôt par la sortie du film d’Andy Warhol Chelsea Girl. Le sujet en est Aaron Payne, un prostitué homosexuel qui rêve de monter un numéro de cabaret, et se fait appeler Jason Holliday. Cabotin invétéré, Payne/Holliday est d’abord ravi de l’occasion qui lui est donnée d’inventer des histoires à son personnage, qu’il raconte avec une loquacité intarissable, sans qu’il soit jamais possible de savoir où s’arrête la réalité et où commence l’affabulation. Mais au fil du temps, la façade s’effrite pour laisser la place à un ton où perce le regret et la haine de soi.
Malgré son parti-pris brut et sans artifice qui lui donne un air de cinéma-vérité, le documentaire est un monument d’ambiguïté. Dès le départ, il met en doute la capacité de la caméra à enregistrer le réel face à un sujet dont l’existence entière a été consacrée à fuir l’évidence et à détourner les apparences. Le nom même que le personnage s’est choisi est significatif : Jason est le nom du héros grec aux deux visages ; quant à son patronyme, il est passé de Payne, qui se prononce comme « pain », la douleur, à Holliday, synonyme de vacances et d’évasion.
Le film est une tentative de révéler l’authenticité derrière le sujet, mais comme la réalisatrice l’a souvent affirmé, il faut un certain talent pour se dévoiler devant la caméra, et tout le monde n’en est pas capable. Dans la bouche de Payne/Holliday, certaines révélations peuvent s’avérer aussi trompeuses que des mensonges. Mais le fait qu’il ait été noir et homosexuel le rendait doublement marginal dans une Amérique où régnait encore la ségrégation, ce qui explique en partie son extraordinaire ingéniosité à se réinventer sans arrêt simplement pour assurer sa survie.