LA MOTOCYCLETTE

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Réunissant Alain Delon, la superstar masculine française, et Marianne Faithfull, vedette anglaise de la chanson et un temps fiancée de Mick Jagger, La Motocyclette s’annonçait comme un des événements du Festival de Cannes 1968. Survint le fameux mois de mai et le festival fut interrompu. Après un faux départ, la production franco-anglaise sortit en juin en France et on put y découvrir Delon parlant la langue de Shakespeare.

La motocyclette en question a été offerte en cadeau de noces par son amant à l’héroïne de ce road-movie carburant au fantasme. Et c’est sur ce "terrible engin" que la jeune femme fait la route pour rejoindre le french lover laissant derrière elle son mari. Entièrement nue sous sa combinaison de cuir, Marianne Faithfull chevauchant les cheveux dans le vent et à plus de cent sa Harley Davidson compose une amazone tout aussi sexy que Brigitte Bardot chantant les trépidations de sa machine.

A sa sortie, La Motocyclette fut interdit aux moins de seize ans, et certes le scénario s’inspire d’un roman érotique d’André Pieyre de Mandiargues. Mais les scènes d’amour de ce voyage initiatique traitées de façon psychédélique avec des solarisations et des effets de couleurs furieusement années soixante tirent plutôt ces séquences vers l’expérimental, l’underground.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver THE SWINGER (Une réalisation de la même époque où Ann-Margaret campe une jeune femme sexy qui conduit une moto) ou encore EASY RIDER (Un autre titre phare du cinéma de la fin des années 60 célébrant la moto et les randonnées sur les routes).

Jack Cardiff s’est d’abord illustré comme directeur de la photographie de La Comtesse aux pieds nus ou des Vikings avant de passer à la réalisation. La Motocyclette représentait pour lui son oeuvre la plus personnelle comme il le déclarait à l’époque. Cardiff était tout aussi heureux de diriger un Alain Delon  au sommet de sa gloire et la séduisante Marianne Faithfull alors âgée de 21 ans. Porté par son enthousiasme, il déclarait carrément à propos de la jeune comédienne « Depuis la première fois que j’ai vu Marilyn Monroe à travers l’objectif de la camera, je n’avais jamais vu une telle beauté. »

Marianne Faithfull garde de son côté un bon souvenir d’Alain Delon qui, fort de son professionnalisme, avait su l’aider à jouer la scène d’amour pour laquelle ils devaient être entièrement nus sur le plateau entourés de nombreux techniciens. Au moment du tournage, Marianne Faithfull figure très souvent dans les pages des magazines. Elle a beau être l’égérie des Rolling Stones et avoir composé avec eux le fameux Sister Morphine, elle n’est pas si bien dans sa  peau. Elle reconnaît que si elle n’avait pas été à ce point bousillée par les drogues, elle n’aurait pas tourné dans certains films.

De fait, alors que la chanteuse et comédienne était très fière d’avoir été sollicitée par Jean-Luc Godard pour chanter As Tears Go By dans une scène de Made in USA, pendant longtemps elle a considéré les films qu’elle a tournés juste après comme sans intérêt. La Motocyclette en faisait partie. Puis, avec le temps, elle a révisé son jugement. « Je suis très reconnaissante à Jack Cardiff de m’avoir fait apparaître si belle grâce à son travail d’éclairage et tout ça. Après coup j’ai pu me dire que ce n’était pas si mal ». Mais, à l’époque, l’actrice n’imaginait pas que ce film continuerait à avoir des fans des années après. Et notamment en Inde. C’est d’ailleurs à Delhi qu’elle l’a vu elle-même pour la première fois lors d’une projection dans une version doublée en hindi qui visiblement suscitait l’enthousiasme du public.

Tourné un an avant « Easy rider » et trois avant « Vanishing point » « The Girl on a Motorcycle » utilise la route comme métaphore de liberté. Cette liberté s’accompagne d’une forte charge érotique, puisque ce qui motive notre héroïne relève avant tout du désir ...

Je découvre Jack Cardiff réalisateur, après avoir été ébahi à plusieurs reprises par son talent de directeur de la photographie, notamment sur les géniaux Narcisse noir et Les chaussons rouges de Powell et Pressburger. Et donc je dois dire que je ne m'attendais pas du tout ...