DEUX JOURS À TUER

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Il y a deux films, deux œuvres qui se rejoignent, se complètent, mais coexistent, dans Deux jours à tuer. Ils illustrent les deux visages du cinéaste Jean Becker. Le premier porte la noirceur et la provocation qui a pu définir le metteur en scène dans un premier temps, le deuxième son humanisme plus posé et positif. Et, entre les deux, se tient un étrange héros incarné par Albert Dupontel.

En contant en effet deux journées d’un homme qui, la quarantaine venue, pourtant pourvu d’une vie parfaite et d’une famille de carte postale, envoie littéralement tout valdinguer, le réalisateur se livre à un jeu de massacre presque digne d’un Claude Chabrol. On n’avait pas vu une telle noirceur, et une telle verve agressive chez Becker, depuis au moins L’Eté meurtrier.

La deuxième partie, qui révèle les motivations plus complexes qu’il ne paraît de cet anti héros très révolté, fait alors subitement surgir cette part plus humaniste de l’auteur, cette description plus intime de drames secrets, de personnages qui tentent de vivre avec des blessures impossibles à garder. Dans cet entre deux, Becker se livre à une synthèse de son cinéma, réconciliant ainsi ses propres contraires.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LE COMPLEXE DU CASTOR (Grosse crise de déprime pour Mel Gibson, qui ne peut plus parler qu'au travers d'une marionnette de castor. On imagine assez bien Albert Dupontel dans le même rôle) ou encore LULU FEMME NUE (Parce que Lulu aussi a décidé de tout plaquer. Elle laisse son mari et ses enfants et part à la mer. En route, elle finit par se trouver.).

Lorsque Jean Becker découvre le récit de Deux Jours à tuer, à travers le livre du même nom de François d’Epenoux, il est fasciné par le comportement, la noirceur provocatrice de son héros, et d’autant plus curieux précisément parce que ce comportement a une explication précise, presque mélodramatique. Une manière de souligner que cette histoire était pour lui. Beaucoup de cinéastes auraient en effet préféré un des aspects spécifiques du livre, seul Becker a vraiment envie d’en embrasser les deux versants, de relever le défi d’une œuvre où la première partie semble en guerre contre sa propre suite.

L’acteur principal Albert Dupontel est, pour le cinéaste, une évidence pour les mêmes raisons. Le comédien/réalisateur a toujours manifesté une forme d’irrévérence, voire de violence qui le rendent particulièrement crédible dans les séquences où le protagoniste vide son sac, mettant à mal ses amis, sa famille, son milieu, avec une belle mauvaise foi assumée. Peu d’acteurs sont en effet capables de passer d’une forme de menace inquiétante, insolente, à l’émotion brute des dernières séquences. Un travail grandement aidé par les décors d’Irlande, où se déroule la dernière partie, et qui ont permis à l’acteur de s’immerger, de manière métaphorique mais également littérale, lors d’une séquence de baignade, dans son personnage.

A l’autre bout du film se tient l’héroïne, sa femme, incarnée par la comédienne Marie Josée Croze. Elle reprsente celle qui souffre clairement le plus du nouveau comportement transgressif de son époux. Elle est aussi celle que ce même mari cherche en fait le plus à protéger, à préserver de la vérité. A ce titre, le visage de l’actrice québécoise, munie d’une « douceur et d’un regard qui me touchent profondément », selon les mots du cinéaste, porte tous les enjeux plus mélodramatiques de Deux Jours à tuer, le pendant sentimental de l’agressivité sarcastique exprimée par Dupontel. Un équilibre fragile, tenu par la grâce d’interprètes sur lesquels repose tout le film.

Deux jours à tuer. La mort. prochaine. Inexorable. Comment la vivre ? Il semble que ce soit plus difficile pour les autres que pour soi. Comment dire au revoir sans se faire regretter ? Dans ce film, Antoine, admirablement joué par un Dupontel au sommet de son art, va faire ...

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