Dirty Harry commence comme une patate chaude que tout le monde à Hollywood se refile. C’est d’abord un couple de scénariste venus de la télé Harry et Rita Fink qui venant de travailler pour John Wayne dans Big jake lui propose le rôle d’un dur de la police new yorkaise. Le duke refuse le rôle qu’il trouve inutilement violent et le script voyage entre Universal et Warner avant d’atterrir entre les mains de Frank Sinatra qui laisse tomber l’affaire suite au décès de son père. On parlait alors de Sydney Pollack ou de Irvin Kershner pour réaliser le film. Dès lors, un certain nombre d’action héros sont contactés. Warner pense à Brando sans oser lui en parler, Steve Mac Queen refuse, puis c’est Burt Lancaster et Paul Newman qui, bon camarade glisse le nom de Clint Eastwood. Le grand Clint explique qu’il ne fera le film que si son pote Don Siegel, avec qui il a tourné deux post-westerns Sierra torride et Les proies en est le réalisateur. L’équipe est complétée par John Milius, sorte de cow boy hippie et artiste névrotique, futur scénariste d’Apocalypse now et réalisateur de Conan le barbare.
On commence par transposer l’action de New York à San Francisco, le souvenir pétaradant de Bullitt est encore dans toutes les mémoires. Pour jouer le tueur en série qui se fait appeler Scorpio inspiré en cela par le tristement célèbre tueur du zodiac, Eastwood suggère le jeune Andrew Robinson qu’il avait vu au théâtre jouer Dostoïevski. Don Siegel qui lui trouve un air de premier communiant accepte tout de suite. Malheureusement non seulement Robinson est pacifiste mais en plus il n’a jamais tenu une arme de sa vie. Les premières prises sont catastrophiques l’acteur sursautant à chaque coup de feu. Finalement le cinéaste l’enverra faire un stage de tir et tout rentrera dans l’ordre. Eastwood lui est déjà Eastwood et il exécute lui-même toutes ses cascades y compris celle où il saute sur le toit du bus. Mieux : alors que Siegel grippé n’est pas en forme il convainc la Warner de diriger la scène du suicide en affirmant pouvoir la tourner en deux nuits. Non seulement il sera comme acteur entre ciel et terre sur une nacelle mais il dirigera comme cinéaste toute l’action, en une seule nuit s’il vous plait. Il faut dire que Eastwood cinéaste est déjà dans le film puisque lors de la scène de la fusillade dans la rue, Harry passe devant un cinéma qui joue Un frisson dans la nuit premier long métrage de Clint Eastwood.
Le film fera un carton, engendrera quatre suites, et fera exploser les ventes du smith et wesson 29, le gros flingue de Harry. Comme quoi l’Amérique restera toujours l’Amérique.