JURÉ N°2 en VOD
- De
- 2024
- 109 mn



- Drame
- Etats-Unis
- Tous publics
- VM - HD
PARCE QUE
À 94 ans, et 40 films au compteur, Clint Eastwood a eu le temps de creuser le sillon de ses obsessions. La famille, le rapport à la vérité, les paradoxes d’une société américaine puritaine et libre à la fois, la morale vacillante devant les aléas de l’existence : on retrouve toutes celles-là dans Juré n°2. Et elles sont quasiment toutes incarnées par le personnage principal, Justin Kemp (l’acteur britannique Nicholas Hoult, excellent), choisi pour faire partie du jury lors d’un procès pour meurtre. Lui qui ne rêve que de revenir vers sa femme, sur le point d’accoucher, doit décider du sort d’un homme accusé d’avoir tué sa compagne. Tout le désigne comme responsable, jusqu’à son passé violent. Tout, sauf la vérité, que Justin Kemp connaît parfaitement et pour cause : le véritable meurtrier, c’est lui.
Juré n°2 n’est pas un film à suspense mais bien un drame psychologique intense, dans lequel l’anti-héros doit faire des choix, de plus en plus acculé. Dire la vérité, c’est risquer de finir en prison. Condamner un innocent, c’est s’alourdir du poids de la culpabilité. Le scénario, signé Jonathan Abrams, sautille intelligemment d’un rebondissement à l’autre, tissant peu à peu une épaisse toile autour de personnages prisonniers de leur conscience. Les emprunts au fabuleux Douze hommes en colère, de Sidney Lumet, sont évidents, mais Juré n°2 est un film bien plus ambivalent. Car ici, il n’y a pas de Henry Fonda pour tirer tout le monde vers la Justice.
Clint Eastwood habille ces dilemmes moraux d’une mise en scène à la fois extrêmement sobre et très élégante, dont l’apparent classicisme n’étouffe jamais la maîtrise. D’une précision quasi-documentaire lorsqu’il s’agit de décrire le fonctionnement d’un prétoire américain (la sélection des jurés, les délibérations, le verdict), le film fait la part belle à ses comédiens. Face à Nicholas Hoult, Toni Collette brille en procureure elle aussi déchirée entre ses intérêts personnels et ses convictions. Et leur ultime scène ensemble, qui se passe de mots pour ne compter que des regards, restera comme le point d’orgue du film et de leurs performances.
Pour un acteur, puis cinéaste, qui a souvent incarné, puis filmé, la vendetta ou la nécessité pour l’individu de s’en sortir seul, les institutions étant impuissantes, voire malfaisantes, Clint Eastwood semble ici revenir à un patriotisme d’un autre genre. L’Amérique est aussi paradoxale que ses citoyens, certes, mais elle a mis en place des garde-fous qui sont loin d’être aussi dysfonctionnels qu’on le dit. Au fur et à mesure qu’il avance, Juré n°2 raconte aussi cela : que ce sont bien les hommes (et, en l’occurrence, les femmes) qui décident ou non de s’emparer des lois, et de façonner la société en conséquence. Et que ces individus sont parfois capables de la droiture morale nécessaire.