LA MULE

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Cela faisait dix ans que Clint Eastwood n’avait pas joué dans un film qu’il réalisait. La dernière fois c’était en 2009 dans Gran Torino où il jouait Walter Kowalski, un vétéran de la guerre de Corée qui révisait ses jugements racistes. En 2019, dans La Mule, il incarne Earl Stone, un autre vétéran de la guerre de Corée dont les valeurs vont également être bouleversées.

À plus de 80 ans, Earl Stone est aux abois. Il est non seulement fauché et seul, mais son entreprise risque d'être saisie. Il accepte alors un boulot qui, en apparence, ne lui demande que de faire le chauffeur. Sauf que, sans le savoir, il s'est engagé à être passeur de drogue pour un cartel mexicain. Et il s’avère plutôt bon à ce jeu-là.

Pour cette adaptation d’une histoire vraie, Clint Eastwood retrouve des acteurs qu’il a déjà fait joué auparavant tels que Bradley Cooper, vu dans American Sniper, Michael Pena aperçu dans Million Dollar Baby ou encore Laurence Fishburne qui jouait dans Mystic River.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver GRAN TORINO DE CLINT EASTWOOD (Un autre vétéran de Corée va voir ses principes changer avec la découverte d'un nouveau monde) ou encore MARIA, PLEINE DE GRÂCE DE JOSHUA MARTON (Ambiance différente mais un autre regard sur le "métier" de mule).

La Mule est inspiré de la vie de Leo Sharp renommé Earl Stone dans le film,. Contrairement au personnage de Clint Eastwood, il était un vétéran de la Seconde Guerre mondiale, et non de Corée, devenu horticulteur réputé. A la suite de la faillite de son entreprise et de la saisie de sa ferme, Sharp, ruiné, se vit proposer par une connaissance de devenir passeur de drogues. Ainsi dans les années 80, il est devenu la mule la plus âgée et la plus prolifique du Cartel de Sinaloa. La DEA le traqua pendant de longs mois sans parvenir à l'identifier en raison de son profil totalement atypique de sympathique et inoffensif grand-père n'ayant jamais eu le moindre PV de toute sa vie. Il fut finalement arrêté en octobre 2011 avec 107 kilos de drogue dans son véhicule. Il est mort en 2016, cinq ans après son arrestation. 

Gran Torino et La Mule sont deux films particulièrement liés. D’abord parce que La Mule marque le retour de Clint Eastwood devant et derrière la caméra pour la première fois depuis Gran Torino. Les deux films mettent en scène un vétéran de la guerre de Corée qui va être amené à entrer dans une forme d’illégalité et à voir son monde et ses opinions évoluer, sans pour autant s’excuser d’être ce qu’il est. Pourtant, Walt Kowalski et Earl Stone sont des personnages totalement opposés en termes de comportement. Et surtout les deux films sont écrits par Nick Schenk. Pour Clint Eastwood, le scénariste a un talent particulier qui lui plaît pour ces personnages qu’il incarne.  Il dit, je cite : « Nick a un don pour créer des personnages qui apprennent toujours de nouvelles leçons, même s’ils sont déjà vieux ». 

C’est aussi une leçon pour le spectateur que tente de donner Clint Eastwood. Souvent critiqué pour ses remarques conservatrices voire réactionnaires, l’acteur et réalisateur montre à voir sa vérité dans La Mule. A la fois, celle d’un homme qui prend conscience du choix de vie qu’il a fait qui l’a éloigné de sa famille, qui pourrait être vu comme un choix égoïste mais qu’il assume. Tout comme les conséquences d’ailleurs. Mais aussi, à la fois, celle d’un homme certes un peu enfermé dans ses principes, cependant capable d’apprendre. Il n’a peut-être pas le bon vocabulaire, n’a peut-être pas les bonnes attitudes mais, comme nous l’explique Clint Eastwood, ça ne fait pas de lui une mauvaise personne. Si La Mule est adapté de la vie d’un autre, il s’agit cependant bien d’un autoportrait.

Cela faisait 10 années que Clint n'avait plus tenté le pari de se retrouver derrière et devant la caméra, c'était pour Gran Torino, et on le retrouve ici, en vétéran reconverti en passeur de drogue, pour une oeuvre à la fois testamentaire et humaine. Autant le dire tout ...

Il est choquant de voir que le temps, finalement, ne ménage personne. Pas même les plus grandes icônes. Pour la première fois à l'écran, Clint en est la victime. Car on est immédiatement pris de compassion, lors de certains plans, devant la faiblesse physique mise en scène, ...

Qu’as-tu fait, ô toi que voilà Pleurant sans cesse, Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà, De ta jeunesse ? Paul Verlaine, Sagesse (1881) Earl fait faillite. Tous ses biens sont saisis. Il ne peut se raccrocher à rien ni personne. Il comprend alors que sa vie a été vaine. ...