TOUTES NOS ENVIES

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Philippe Lioret s’est fait connaître comme ingénieur du son chez Jean-Pierre Mocky, Michel Deville ou Robert Altman avant de passer à la réalisation en 1996 avec Tombé du ciel où il dirigeait Jean Rochefort. Le cinéaste retrouve ici Vincent Lindon avec lequel il avait tourné Welcome, film bouleversant sur les rapports entre un moniteur de natation et un jeune clandestin. Il a aussi offert un nouveau rôle à Yannick Renier qui jouait également dans ce précédent film. Le réalisateur poursuit son exploration de la société française et de ses dérives avec Toutes nos envies, libre adaptation de D’autres vies que les miennes d’Emmanuel Carrère. Le romancier est très apprécié des cinéastes car plusieurs de ses livres ont déjà été portés à l’écran : La classe de neige par Claude Miller et L’Adversaire par Nicole Garcia. Carrère a lui-même transposé son roman La Moustache au cinéma avec Vincent Lindon dans le rôle principal. Le scénariste Emmanuel Courcol est un fidèle collaborateur de Philippe Lioret depuis Mademoiselle en 2010. Egalement acteur, il apparaît ici dans le rôle d’un médecin. Les deux hommes ont vite compris que le roman n’était pas adaptable de façon fidèle car il mettait en scène des membres de la famille de l’auteur. Ils ont donc créé de nouveaux personnages et restructuré le récit tout en gardant l’aspect sombre du livre. Ils ont d’ailleurs fait le choix de ne plus ouvrir le roman pendant leur travail d’écriture. Emmanuel Carrère a soutenu ce projet en les invitant à prendre toutes les libertés qu’ils estimaient nécessaire pour adapter son roman. Pour la première fois de sa carrière, Philippe Lioret est le producteur principal de son film aux côtés de Christophe Rossignon avec lequel il avait travaillé pour L’Equipier et Je vais bien, ne t’en fais pas. Rossignon est notamment connu pour avoir produit La haine de Matthieu Kassovitz qui lui a valu le César du producteur de l’année en 1996.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver DANS LA TOURMENTE DE CHRISTOPHE RUGGIA (Parce que ce film montre comment des gens peuvent se dépasser dans l'adversité d'une société hostile.) ou encore LES NEIGES DU KILIMANJARO DE ROBERT GUÉDIGUIAN (Parce qu'il parle de la France actuelle avec une grande humanité.).

Dans Toutes nos envies, Philippe Lioret se penche sur une thématique qui lui est chère en décrivant comment une rencontre aide des personnages à se dépasser et à s’unir contre l’absurdité du monde. Il définit son film contre un thriller intime et considère qu’il s’agit de son film le plus personnel. Le réalisateur s’est passionné pour cette histoire parce qu’il souhaitait décrire des personnages confrontés à l’inattendu d’une situation extrême. Les « envies » qu’évoque le titre du film sont celles que l’argent permet de satisfaire, mais elles définissent aussi les rapports entre Claire et Stéphane. C’est après avoir vu un prospectus de société de crédit invitant le consommateur à « céder à toutes ses envies » que Lioret a choisi ce titre. Marie Gillain tenait énormément à obtenir le rôle de Claire, ce qui lui semblait un bon moyen de se démarquer du personnage de « jeune fille en fleur » qui lui colle à la peau depuis qu’elle a incarné la fille de Gérard Depardieu dans Mon père ce héros. L’actrice a insisté auprès du cinéaste pour obtenir ce qu’elle considère comme un « rôle de femme ». Philippe Lioret a fini par lui faire passer une audition au cours d’une lecture où il lui donnait la réplique en jouant tous les autres personnages. Il a ensuite choisi une autre comédienne puis a fini par contacter de nouveau Marie Gillain quand elle a tourné un bon d’essai et lui a envoyé une lettre disant qu’elle était persuadée d’être le personnage. L’actrice a passé beaucoup de temps dans les tribunaux d’instance et n’a pas hésité à questionner des juges pour mieux comprendre leur métier et reproduire les attitudes. Elle a essayé de faire passer l’empathie que ces juges ressentent pour les personnes surendettées qu’ils essayent d’aider. Elle avoue avoir aussi pensé à un proverbe que lui répétait sa mère quand elle était enfant : « Qui veut ne rien faire trouve une excuse, qui veut faire quelque chose trouve un moyen… ». La scène qu’il l’a le plus bouleversée est celle où sa fille demande à Claire si elles iront un jour en Afrique. Vincent Lindon a abordé le personnage de Stéphane comme s’il était un Robin des Bois moderne. Il aimait l’idée que le film pourrait ouvrir le début sur le surendettement et les abus des sociétés de prêts à la consommation.