MADEMOISELLE JULIE

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C’est en 1982 que la comédienne d’origine norvégienne Liv Ullmann – interprète fétiche, épouse et muse du Suédois Ingmar Bergman depuis Persona en 1966 – commença à s’intéresser à la mise en scène, au théâtre puis au cinéma. 32 ans et cinq films plus tard, elle adapta Mademoiselle Julie, une pièce qu’elle portait en elle depuis toujours et qu’elle regrettait de n’avoir jamais eu l’occasion de jouer sur scène.

C’est lorsque des producteurs lui proposèrent de travailler sur le thème de la femme fatale, qu’elle leur parla de la pièce du Suédois August Strindberg. Nous sommes en Irlande – et non en Suède comme dans la pièce –, au soir de la Saint-Jean 1890. Alors que tous festoient autours des feux traditionnellement allumés ce soir-là, la charmante Mademoiselle Julie, fille d'un riche aristocrate, est courtisée par John, le valet de son père, lui-même fiancé à Kathleen, la cuisinière.

Les deux domestiques sont incarnés par l’Irlandais Colin Farrell et l’Anglaise Samantha Morton, quand au rôle titre, il est tenu par l’Américaine Jessica Chastain, vue la même année dans Interstellar de Christopher Nolan. « Jessica Chastain est au sommet de son art » pouvait-on lire dans la revue Positif, lors de la sortie française du film, en septembre 2014.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LES ADIEUX À LA REINE (2012) (Autres genres de relations ancillaires...) ou encore DÉSIRÉ (1937) (Ce n’est pas de la fille de son patron mais, directement, de sa patronne dont le beau Désiré tombe amoureux.).

Créée à Copenhague en mars 1889 dans une mise en scène d’August Strindberg, lui-même, Mademoiselle Julie fut représentée pour la première fois à Paris en 1893, dans le cadre de l’emblématique Théâtre Libre d’André Antoine. Il faudra attendre septembre 1952, pour qu’elle y soit rejouée, dans une adaptation de Boris Vian et une mise en scène de Jean-Marie Serreau, par François Chaumette et Eléonore Hirt – future fille de Jean Gabin, dans la Horse de Pierre Granier-Deferre. La pièce fut adaptée au cinéma une douzaine de fois – dont trois à l’époque du muet – avec notamment : Asta Nielsen, Anita Björk et Saffron Burrows. Avant de faire appel à Jessica Chastain, Liv Ullman avait pensé à Michelle Williams – vue en Marilyn Monroe dans My Week with Marilyn de Simon Curtis. Mais, trop occupée, la comédienne dut décliner l’offre.

Pour des raisons économiques, le film que vous venez de voir fut tourné en anglais. C’est ce qui incita Liv Ullman – qui ne voulait pas faire parler anglais des personnages suédois – à déplacer l’action en Irlande où, effectivement, le film fut tourné, dans différentes pièces d’un manoir de la fin du 18e siècle et dans les forêts avoisinantes, ce que n’avait pas imaginé Strindberg, très respectueux de la fameuse règle du théâtre classique : unité de temps, unité de lieu et unité d’action. Interrogée à ce propos, Liv Ullman assura que le dramaturge aurait, lui-même, « adoré ce lieu ». Elle précisa, également, que c’est bien l’Irlande, et non l’Angleterre, qu’elle avait choisie, en raison des similitudes entre la Suède et l’Irlande de cette époque, particulièrement en ce qui concernait l’affrontement des classes sociales et l’usage de la langue, différente entre maîtres et valets. D’ailleurs, sur le plateau, un coach veillait à l’authenticité des différentes prononciations.

Après avoir répété une quinzaine de jours en tête à tête avec ses trois comédiens, la réalisatrice entama le tournage de son film, en les laissant adapter leurs déplacements aux décors, n’hésitant pas, parfois, à modifier son propre découpage. Elle voulait se fier à leur instinct et ne pas entraver leur liberté. Elle-même actrice, Liv Ullmann (75 ans à l’époque du tournage) fut dirigée par d’innombrables réalisateurs au cours de sa longue carrière, entamée à 19 ans. « J’ai connu de très bons metteurs en scène, mais aussi de très mauvais ! expliqua-t-elle. Je me suis aperçue que les mauvais metteurs en scène n’arrêtent pas de vous parler, ils envahissent votre imaginaire et vous ne pouvez plus rien faire ! »

Contrairement à beaucoup, cette adaptation du classique du théâtre de Strindberg m'a plut. Le texte garde son intensité et ses enjeux tragiques, les thèmes sont respectés selon moi et cela sonne très juste. D'autant que ce huis-clos non-strict est filmé par moments un peu ...

Une histoire conçue à l'origine pour le théâtre. Il faut y être préparé car les personnages évoluent en en huis clos (ou presque) et il y a très peu de temps morts. Tellement peu de temps morts qu'on a l'impression que les personnages basculent d'une émotion à l'autre ...

La pièce de Stringberg est magnifiquement servie par la mise en scène classique et le jeu parfait des deux acteurs, dans un huis-clos qui exalte l'âpreté des sentiments. La lutte des classes est également au coeur de la mise en scène, présentée avec une précision glaçante. ...