LE RADEAU DE LA MÉDUSE

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Que celui qui n’a jamais entendu parler du naufrage de La Méduse lève le doigt ! De fait le tableau peint par Géricault en 1819 à l’occasion d’un nouveau Salon au Louvre a définitivement popularisé ce terrible fait divers maritime.  Ce dernier était survenu trois ans auparavant, le 2 juillet 1816 précisément,  quand une frégate française nommée « La Méduse » avait fait naufrage au large des côtes du Sénégal. Le navire dériva durant treize jours et Géricault a représenté le moment crucial où une partie des naufragés encore en vie voient le navire qui se portera à leur secours. Un navire qui n’est encore alors qu’un minuscule point sur la ligne d’horizon.

Le cinéaste Iradj Azimi a choisi de retracer et l’histoire de ce naufrage et celle de la mise en œuvre du tableau de Géricault. Dans la réalité que reconstitue donc le film,  tout a commencé en 1815, juste après la défaite de Warterloo quand La Méduse, sous les ordres du commandant Hugues Duroy de Chaumareys,  prend la mer à Rochefort, avec à son bord notamment le futur gouverneur du Sénégal et sa famille. Mais rapidement des tensions interviennent au sein de cette expédition officielle.  Quand survient le naufrage, cinq canots à voile sont mis à la mer, tandis qu’un radeau de fortune bientôt laissé à la dérive accueille les cent-quarante soldats et marins de l’équipage.

Jean Yanne en commandant, Daniel Mesguich en militaire autoritaire, Claude Jade en épouse de haut fonctionnaire mais également Laurent Terzieff dans le rôle de Géricault, le film a pour lui une belle distribution. Il faut néanmoins savoir avant de s’y embarquer que qu’il a connu un tournage mouvementé et qui du coup dura de 1987 à 1991. Tourné principalement en Guadeloupe, il eut notamment à souffrir du cyclone Hugo qui frappa très durement les Antilles en septembre 1989.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver CABEZA DE VACA (Tout commence, là aussi, par un naufrage. Un conquistador échoué en Amérique du sud est recueilli par les Indiens et se familiarise peu à peu à leur mode de vie.) ou encore LES RÉVOLTÉS DU BOUNTY (Que ce soit avec Clark Gable, Marlon Brando ou Mel Gibson, la mutinerie des marins du Bounty est un bon exemple des conséquences d'un mauvais commandement en mer.).

Peinture et cinéma ont toujours fait bon ménage. Comme si le 7èArt n’avait aucun problème à régler régulièrement sa dette à cet art de la représentation. Il serait impossible de recenser les séquences de films qui font explicitement référence à tel ou tel tableau. On peut ainsi songer par exemple à la façon dont Xavier Beauvois filme, dans des hommes et des dieux, le cadavre d’un terroriste mort que l’on ne peut regarder sans songer immédiatement au Christ mort peint par l’Italien Mantegna au XVè siècle. Ou bien encore dans un hommage filial absolu, les nombreuses allusions visuelles de Jean Renoir aux œuvres de son père Auguste, dans « Une partie de campagne » notamment. Difficile par ailleurs de ne pas voir que la maison de « Psychose » de Hitchcock aurait pu être peinte par Edward Hopper.

Jean-Luc Godard est assurément l’un des cinéastes qui dès « Pierrot le fou » avec ses explosions de couleurs vives pense le plus à la peinture en maniant sa caméra.  C’est dans son film « Passion » que le cinéaste va le plus loin dans cette exploration de l’influence de la peinture puisqu’il recrée des toiles de maîtres avec de véritables personnages et décors. Des chefs d’œuvre de Goya, Titien ou bien encore Ingres sont ainsi intégrés à la narration générale. Godard, à la manière d’un peintre, esquisse dans le réel des œuvres vivantes. Le spectateur est ainsi invité à littéralement pénétrer dans un tableau pour le redécouvrir.

Tout comme Azimi avec Géricault peignant son « Radeau de La Méduse, nombre de cinéastes avant lui ont pris pour figure principale un peintre et sa création. Dans le domaine documentaire, Henri-Georges Clouzot en 1956 dans « Le Mystère Picasso »  a filmé le peintre au travail, mettant en scène une sorte de suspense artistique. Côté fiction, les biographies picturales ne manquent pas. On accordera sans nul doute une place de choix à celle que Maurice Pialat, en 1991, consacra à Van Gogh incarné par un Jacques Dutronc assurément très inspiré. Peinture et cinéma font décidément très bon ménage !