BLOODY MILKSHAKE

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L'un des bénéfices du phénomène MeToo aura été l'émergence très forte dans le cinéma d'action américain d'une nouvelle génération d'héroïnes. Elles en remontrent aisément à leurs congénères masculins, jusqu'à distribuer désormais tout aussi allègrement des bourre-pifs ou être aussi à l'aise dans le maniement des armes lourdes. 

Bloody Milkshake confirme pleinement cette sororité décomplexée autour d'une société secrète de tueuses à gages hors- pair, sans perdre de vue l'une des revendications du féminisme actuel : en finir avec la main-mise du patriarcat, ici incarnée par une firme commanditaire des contrats d'une de ces tueuses. 

Bloody Milkshake rendant coup pour coup avec une comédie d'action particulièrement décomplexée, que ce soit dans une violence graphique ou un humour vachard que ne renierait pas un Quentin Tarantino, pour un résultat qui assume que le cinéma de genre s'empare aussi des théories du genre, quitte à sentir sérieusement la poudre.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver BOULEVARD DE LA MORT (Tarantino, influence claire du ton de Bloody Milkshake, s'est lui aussi essayé à filmer une bande de filles décomplexées.) ou encore ATOMIC BLONDE (Une seule héroïne pour cet autre film d'action, mais tout aussi capable que celles de Bloody Milkshake d'en découdre avec tout le monde).

Lorsque Navot Papushado se lance dans Bloody Milkshake, c'est avant tout sous l'angle d'une série B d'action pop désireux de combiner films de kidnapping et de tueurs à gages. L'axe féminin arrivera plus tardivement mais s'imposera pour donner une autre teinte au projet, notamment en incluant trois générations de femmes, représentant leur condition passée, présente et future. Toutes sont reliées aux Bibliothécaires, cette société secrète ayant traversé les âges. Plus encore que Sam, sa mère et Emily, l'orpheline qu'elle recueille, cette organisation recèle le thème principal de Bloody Milkshake : la connaissance, qu'elle soit de l'art de tuer ou de la littérature est un réel pouvoir dont les femmes doivent s'emparer, y compris pour en faire une arme. Ici littéralement.

Papushado s'implique directement avec ce principe : enfant, le réalisateur était un vrai rat de bibliothèque, se nourrissant des conseils de lecture de ses employés, devenus à ses yeux de véritables héros. Les autres inspirations de Bloody Milkshake sont plus cinématographiques, mêmes si elles aussi liées aux souvenirs d'enfance du réalisateur. L'un de ses films alors favoris était Bugsy Malone, la comédie musicale pour enfants d'Alan Parker revisitant l'univers du film de gangsters. Il en reste une trace dans Bloody Milkshake, dont la photo est signée Michael Seresin, longtemps collaborateur régulier de Parker.  

Les scènes d'action sont elles empreintes de la vénération de Papushado pour les maîtres du burlesque, Buster Keaton en tête et ceux du cinéma d'arts martiaux asiatique, notamment Jackie Chan. Elle aura guidée l'écriture de ces séquences devant à la fois être très chorégraphiées mais plus encore jouer sur le contraste entre leur part d'absurde et de surréalisme et le challenge imposé à des personnages ne connaissant aucun répit. A l'image d'un film de divertissement enjoué, gourmand jusque dans ses excès mais n'oubliant pas un élément humain.

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