PARADIS

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Malgré les portraits de Poutine dans les mairies, c’est un peuple abandonné par la Russie que permet de découvrir Paradis, d’Alexander Abaturov. Aux confins de la Sibérie, l'État central n’est pas obligé d’intervenir en cas d’incendie. On appelle ça, la « zone de contrôle ». Derrière ce nom qu’on croirait sorti d’un roman de science-fiction ou d’invasion de zombie se cache en fait l’impuissance d’un état central bien moins fort qu’il ne veut l’admettre. La Russie est un état immense – de loin le plus grand en superficie – ; quadriller un tel territoire est illusoire et impossible. Alors, la Russie laisse sa portion orientale se débrouiller comme elle le peut.

Ces peuples de Sibérie, on les découvre lucides face à la situation. Ils utilisent au mieux leur équipement : télésurveillance, tracés sur cartes, véhicules terrestres. Et surtout, des hommes qui connaissent bien le terrain. Nous ne sommes pas dans le fantasme du peuple autochtone qui fonctionne avec des moyens dépassés. Non, dans Paradis, les habitants se servent au maximum de la technologie qui leur est allouée pour lutter contre les grands incendies survenus à l’été 2021. Seulement, aucun Canadair, ni aide extérieure ne vient les aider à contrôler ces feux gigantesques. « Contrôler » est bien le mot, ou ralentir à la rigueur. Car, comme pour les Etats-Unis et le Canada, et contrairement aux méthodes européennes, les feux de forêts ne sont jamais stoppés par l’Homme dans ces régions. Ils empêchent au maximum leur propagation et espèrent que la pluie viendra faire son travail. « Les grands feux, c’est comme ça, c’est vivant », analyse, fataliste, un des spécialistes sur place.

Paradis est un grand film qui montre ces espaces rongés par les flammes. Les images sont sidérantes : des hommes qui marchent en direction d’un feu, et en arrière-plan, dans le flou, d’autres petits foyers où des souches brûlent. Le danger semble partout : des pylônes brûlent, une fumée opaque étouffe les habitants et envahit le cadre. Et au milieu, ces hommes-là qui gèrent avec un calme stupéfiant.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver DEMAIN (La question du changement climatique est traitée très souvent dans le documentaire. En France, c'est sûrement Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent qui a eu le plus de retentissement.) ou encore BRAGUINO (Le documentaire mystique de Clément Cogitore se déroule dans cette Sibérie si sauvage, si hors du monde, si fascinante et effrayante.).

Paradis est aussi un film remarquable sur les hommes et les femmes, sur leur quotidien pendant et en dehors des incendies. Face à cette apocalypse, on entend les enfants jouer et crier « c’est l’apocalypse-zombie ! » Les femmes préparent les repas des pompiers de fortunes et les apportent en camionnette au plus près du terrain.

Le soir, un des hommes qui coordonne les opérations est hébergé dans une immense yourte qui sert habituellement de salle de réception. Et que fait-il dans son lit de camp ? Il regarde YouTube. En une scène se dessine à la fois toute la singularité de la situation et la banalité qui la côtoie. Et que fait un couple de jeunes qui possèdent une voiture de sport ? Des drifts sur la glace pardi ! Logique pour eux, inattendu pour un occidental. Ce rapport étrange entre ces deux mondes permet au film de rappeler que si des particularismes locaux existent, que certains peuples sont isolés, nous partageons tous la même Terre et que nous subissons tous les effets du réchauffement climatique.

S’il on doit trouver un aspect positif au réchauffement climatique, c’est que les flammes de l’enfer ne nous paraîtront pas si pénibles. Les habitants de la Yakoutie, dans l’extrême-orient russe, n’ont eu d’autre choix que de s’habituer aux brasiers qui consument ...

Une très belle fable documentaire captivante et brûlante d'actualité. L'usage récurrent de la caméra subjective nous implique dans le quotidien tourmenté des villageois et donne de très belles images. Des visages tantôt inquiets tantôt optimistes, une forêt en ...