LUX AETERNA

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Gaspar Noé ne fait jamais rien comme tout le monde : en février 2019, trois mois lui ont suffi pour écrire, produire, tourner et monter ce Lux Aeterna avant de se retrouver en sélection au Festival de Cannes avec ce moyen-métrage, interprété par Béatrice Dalle et Charlotte Gainsbourg, libres comme par hasard lorsque le cinéaste les avait sollicitées pour ce projet réalisé dans l’urgence. A croire que Gaspar Noé bénéficie de relations occultes. Après tout, il avait dans la tête de faire un film de sorcières.

Lux Æterna est ce qu’on appelle une mise en abyme. “Un film dans le film” qui voit Charlotte Gainsbourg accepter de jouer une sorcière jetée au bûcher dans le premier film réalisé par Béatrice Dalle. Seulement voilà, l'organisation (anarchique), les problèmes (techniques) et les dérapages (démentiels et psychotiques) de la réalisatrice plongent peu à peu le tournage dans un chaos indescriptible. 

Les douze premières minutes sont extraites d’une scène d’impro entre les deux actrices. Mise en boîte lors du dernier jour de tournage, elles sont extraites d’une séquence qui en avait duré 20. Les indications du metteur en scène étaient simples : "Parlez du tournage de ce film, de sorcières, d'autres tournages, etc. Mais évitez juste de citer des noms, et amusez-vous au maximum". Ce qu’elles parviennent à faire très facilement. Et nous avec. Mais attention, ce sera votre seul moment de détente, car la suite sera bien l’enfer annoncé ! 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver ROCK N' ROLL (2018) (Guillaume Canet y joue à être Guillaume Canet en se moquant allègrement de lui et de sa vie d'acteur.) ou encore LE BAL DES ACTRICES (2009) (Comme dans Lux Aeterna, le film de Maïwenn joue à fond la carte de la mise en abyme puisque le film raconte aussi le quotidien d'actrices qui essayent de tourner un film. Jusqu'au vertige.).

Lux Æterna a la particularité d’être une oeuvre de commande d’Anthony Vaccarello, directeur artistique de la maison Yves Saint Laurent, dans le cadre de Self, un projet qui invite différents artistes à réinterpréter les collections et l'esprit de la maison de haute couture. Le film accueille ainsi quelques égéries de la marque dont l’acteur Félix Maritaud, découvert dans 120 battements par minute. 

L’idée de Gaspar tenait sur trois lignes manuscrites et tournait autour de la sorcellerie. Cette vision qu’il donne de ce qu’est le cinéma en coulisses décrit bien l’enfer que peut représenter l’activité de personnes qui s'agitent comme des fourmis en attendant le premier clap. Elle dit aussi la part de "magie", parfois noire, qui peut se mêler au processus créatif. Le crescendo hystérique n’est pas sans rappeler celui qui servait de trame à Climax, son précédent film. 

Le prologue emprunte à deux longs-métrages que Gaspar Noé cite comme ayant été sa source d’inspiration dans le générique de fin. Le premier est La sorcellerie à travers les âges de Benjamin Christensen (1922) dans lequel ce cinéaste danois illustrait en mode documentaire les méthodes utilisées par l’Inquisition. Un film censuré aux Etats-Unis pour perversion. Le second est Jour de colère du maître danois Carl Theodore Dreyer (1943) dont Gaspar s’est approprié une citation : “nous, metteurs en scène, nous avons une grande responsabilité. Il nous appartient d’élever le film du plan de l’industrie à celui de l’art”.

Forcément, quand trois personnalités aussi atypiques que Dalle (plus rock’n’roll tu meurs), Gainsbourg (complètement maso chez von Trier) et Noé (chamboule tout du cinéma français) décident de faire un film ensemble sous les auspices de la maison Saint Laurent, forcément ...

Le chaos règne. Gaspar Noé s’installe, petit à petit, en cinéaste du chaos, et Lux Æterna, son dernier film en date, ne déroge pas à la règle. En fait, ce moyen-métrage pourrait être vu comme le prolongement de Climax, suivant le même schéma narratif, la même idée. ...

J'aime vraiment beaucoup Gaspar Noé, j'ai l'impression qu'il fait des films de plus en plus foisonnants, où il se passe de plus en plus de choses, qui veulent dire de plus en plus de choses et qui visuellement osent de plus en plus de choses (bien que l'expérimentation visuelle ...