DON JUAN

en VOD

C’est l’histoire d’un type qui finit par souffrir par là même où il fit souffrir les autres… J’explique : le film de Serge Bozon qui va suivre entend revisiter le personnage emblématique de Don Juan mais il en inverse le processus. Tahar Rahim y incarne un séducteur jadis invétéré, soudain malheureux comme une pierre car la seule femme qu’il a vraiment aimée s’est éloignée de lui. Il ne pense plus qu’à elle, ne voit plus qu’elle, poursuit son ombre comme on chasse un fantôme, y compris au hasard de ses nouvelles rencontres…

Et, pour appuyer son propos, le réalisateur a la bonne idée de placer son récit dans le cadre d’une répétition de la pièce de Molière et de saupoudrer le tout d’un bon zeste de comédie musicale !

Tahar Rahim donc, Virginie Efira mais aussi Alain Chamfort, (dans le rôle fragile et émouvant du père d’une des « victimes » de Don Juan), donne à l’ensemble une cohérence sensuelle et tendre que l’on croise assez rarement au cinéma…

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LES CHANSONS D'AMOUR (Aimer, être aimé, ne plus aimer, hésiter, espérer... Parfois, c'est en chansons qu'on avance sur les chemins escarpés du coeur...) ou encore DERNIER AMOUR (Don Juan ou Casanova : même combat ! Voici les deux plus grands séducteurs de l'Histoire confrontés aux affres du dépit amoureux...).

La figure de Don Juan hante notre culture populaire depuis 1665, date de la création de la pièce de Molière, « Dom Juan ou le festin de Pierre ». Ce nom est même devenu un élément de langage, associé à l’image d’un homme obsédé par la séduction et plus si affinités ! Un personnage qui, un fil des siècles, s’est illustré en littérature, sur scène évidemment, en musique, à la télévision et bien entendu au cinéma. Dès 1916, l’italien Edoardo Bencivenga porte ses mésaventures sentimentales à l’écran, suivi dix ans plus tard par l’américain Alan Crosland avec John Barrymore dans le rôle-titre. Un film passé à la postérité pour une autre raison : il est aujourd’hui considéré comme le premier long métrage sonore de l’Histoire, avant l’avènement du parlant…

En 1948, Hollywood poursuit son exploration de la thématique avec « Les aventures de Don Juan » dans lequel Errol Flynn apporte sa fougue et son charme à une bluette bourrée de scènes d’action dont l’enjeu est de porter secours à la reine Margaret ! En 1956, nouvelle variation avec le « Don Juan » de John Berry et cette fois, c’est Fernandel qui vole la vedette au personnage titre dans le costume de Sganarelle (le valet de Don Juan) les deux hommes ayant échangé leurs identités. Le serviteur va à son tour se voir pourchassé par toutes les plus belles femmes de la région de Tolède, prouvant avec certes une finesse toute relative que « l’habit fait le moine »… En 1973, Roger Vadim va lui s’autoriser un gros pas de côté avec « Si Don Juan était une femme ? » en confiant à Brigitte Bardot la tâche de séduire tout ce qui lui tombe entre les griffes, homme ou femme… Une œuvre à l’époque jugée licencieuse et libertine dans laquelle on peut aussi croiser Maurice Ronet et Jane Birkin.

Six ans plus tard, Joseph Losey se consacre lui à l’opéra « Don Giovanni » de Mozart et Da Ponte, utilisant les beaux organes de Ruggero Raimondi et José van Dam dans les décors sublimes de la Vénétie… Signalons encore une bizarrerie : « Don Juan DeMarco » avec Johnny Depp et Marlon Brando où la psychiatrie croise le thème du suicide ou encore le « Don Juan » de Jacques Weber en 1998, étude déconstruite de l’œuvre de Molière…

Le regard de Laurent en direction d'une passante, depuis le balcon de la mairie où il attend Julie pour leur mariage. C'est le regard de trop, le premier d'une longe série, égrenés par ci par là, qui fera fuir Julie. Elle disparaît, mais ses traits réapparaissent ...

Les attendus peuvent être trompeurs : lorsqu’on annonce une comédie musicale autour du mythe de Don Juan, qui plus est incarnée par des comédiens aussi charismatiques que Virigine Efira et Tahar Rahim, un certain lustre glamour et lyrique semble promis au spectateur. Il semble ...

Sans aucun doute Serge Bozon est un réalisateur difficile à aimer: son naturalisme (dans La France surtout) mêlé à des séquences de comédies musicales et autres afféteries maniérées à directions artistiques rudimentaires peuvent rebuter et barricadent un univers cinématographique ...