CAMILLE CLAUDEL

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Camille Claudel a beau être un biopic de Camille Claudel – personne n’en doutait -, c’est aussi un film pour, par et sur Isabelle Adjani, qui ne joue pas la fougueuse sculptrice, elle l’habite. Le rôle est taillé sur mesure pour la comédienne qui passe ici par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel des émotions et nous emporte comme peu savent le faire. 

Ce n’est pas Adjani qui signe le film, mais Bruno Nuytten. Un très grand directeur de la photo qui passe ici à la mise en scène. A la demande de la star, qui est, à la ville, sa compagne. Nul mieux que lui ne pouvait donc connaître les subtilités de son jeu. Il signera quelques années plus tard, deux autres films : Albert souffre et Passionnément. Avant de disparaître des radars du cinéma… 

Camille Claudel est un film sur l’art, mais aussi une mise en lumière de la dépendance parfois névrotique que l’artiste entretient avec son désir de créer pour exister. Il y a quelque chose de très violent dans la relation entre Camille Claudel et Rodin, qui sont amants certes, mais aussi des rivaux qui se vampirisent mutuellement pour parvenir à la consécration.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver VAN GOGH (C'est un autre biopic d'artiste passionné mais qui souffre de ne pas être reconnu et finit par sombrer dans la folie) ou encore LE MESSIE SAUVAGE (C'est un autre biopic de sculpteur célèbre).

Si le talent de Camille Claudel est éminent, si ses sculptures trônent dans les musées du monde entier, la reconnaissance du grand public a de toute évidence été renforcée par le succès du film. Un succès à la fois critique et public, qui ne s’est pas cantonné aux frontières de l’Hexagone.  Il faut dire que le film est magnifique, qui s’adresse autant à ceux qui portent l’art au pinacle qu'au grand public qui observe les passions humaines. Et qu’il est sorti à un moment-clé de la carrière d’Adjani, qui venait d’affronter d’affreuses rumeurs sur son infection par le sida et ne voulait qu’une seule chose : prouver qu’elle était bien vivante.  De fait le film est beaucoup plus bouillonnant que ne le sera Camille Claudel 1915, le film de Bruno Dumont avec Juliette Binoche dans le rôle-titre, consacré à l’artiste déchue, après qu’elle ait été enfermée dans une maison de santé.

Le travail de Juliette Binoche est superbe, mais il n’a pas pour autant fait oublier celui d’Isabelle Adjani, qui restera à jamais Camille Claudel. Il faut dire qu’elle doit au film d’avoir décroché l’un de ses César, peut-être celui dont elle est le plus fière. Un peu comme si le rôle avait été taillé sur mesure pour la comédienne, dont le goût pour les personnages névrosés, fantasques, au bord de la folie devenait de plus en plus évident au fil de sa carrière. A cet égard Camille Claudel est un peu une apothéose, après Adèle H, Le Locataire, Possession ou Mortelle Randonnée…

Une apothéose qui est aussi la fin d’un cycle. Après Camille Claudel, comme si Adjani avait tout donné, sa carrière va devenir assez erratique, faite d’absences prolongées et de retours souvent ratés. A l’exception de La Reine Margot bien sûr, le chef d’œuvre de Patrice Chéreau, qui à lui seul rachète les échecs de La Repentie, de Diabolique ou de Toxic Affair. Aujourd’hui si elle n’est pas à la retraite, Isabelle Adjani est pour le moins en retrait, comme absente du monde. Un peu comme Camille Claudel qui a passé les trente dernières années de sa vie dans un établissement de santé sans produire quoi que ce soit.