BREEZY

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Un américain un peu mûr, un peu old-fashion, une jeunesse très flower power, ce pourrait être son père, elle pourrait n’être qu’une môme, c’est pourtant la foudre qui leur tombe dessus, sans crier gare.

Nous sommes dans les années baba cool, Woodstock n’est pas si loin et pour, son troisième film en tant que réalisateur Clint Eastwood s’offre, en 1972, une oeuvre minuscule et mélancolique. C’est Breezy qui n’aura aucun succès et plombera la carrière de sa jeune interprète Kay Lenz.  Pourtant, breezy, le surnom de la jeune fille, signifie littéralement enjoué, et ce sont les effets cette douce brise qui circule dans le film.

J’oubliais l’essentiel. William Holden joue l’homme amoureux, quand au cinéaste il ne fait qu’un cameo dans son film. Dans une veine délicate qui sera bien plus tard celle de Sur la route de Madison, le grand Clint rappelle que l’amour n’a ni âge, ni frontière.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver TAKING OFF DE MILOS FORMAN (1971) (Une lycéenne en fugue à New York pour suivre un musicien, Central Park au début des années 70 et sa culture hippie, des protest songs, des cheveux longs et des vêtements indiens : le premier film américain de Milos Forman.) ou encore EASY RIDER DE DENNIS HOPPER (1969) (Le film de la contre-culture, sur la drogue, la liberté, l'amour libre. Devenu emblématique des années beatnik il oppose une jeunesse qui cherche à s'affranchir des contraintes de la société consumériste et traditionnelle aux conservatismes de toutes sortes. Peace and love. And fuck them all.).

Scandale : William Holden en 1972 a 54 ans et la jeune Kay Lenz 20. A cette époque pourtant, leurs 34 ans d’écart ne posent guère de problème, si ce n’est aux rombières du sud et de la Nouvelle Angleterre. Ne sommes-nous pas dans la flower power génération et sa libération sexuelle? Et puis pour la promo du film Universal avait mis en avant la « Holden romantic tradition », la « tradition romantique Holden ». Il faut se souvenir qu’aux Etats-Unis le grand William restait l’homme de Sabrina de Billy Wilder (1954) avec la délicate Audrey Hepburn. Bref il avait fait chavirer les coeurs des mères, pas de raison qu’il ne le fasse pas avec les filles.

Sauf que le film fut un four absolu. Pire : il suscita une indifférence totale et les fans de Eastwood qui aimaient son gros flingue lui reprochèrent de faire dans la chronique sentimentale. Il faut dire que pour ses deux  premiers films comme réalisateur Un frisson dans la nuit (1971) et L’homme des hautes plaines (1972), horreur et western, le héros était en mode adrénaline.

Au départ, le grand Clint voulait absolument tourner avec Holden. Mais eut plus de mal à trouver sa « Breezy ». Les noms de Lauren Hutton, Cybill Sheperd, Tuesday Weld circulèrent. Et surtout celui de Jo Ann Harris qui avait travaillé avec Eastwood sur Les proies de Don Siegel en 1971. Mais parce qu’il voulait une débutante il choisit Kay Lenz. Ce fut une jolie star éphémère qui traina une carrière en demi-teinte. Par la suite, Eastwood compris que ses films sans lui souffrait d’un handicap. Il attendit presque vingt ans avant de resigner un film sans y paraître : Bird (1988). Mais même quand le macho évoqua de nouveau le coeur qui battait dans sa poitrine, il se montra : Sur la route de Madison (1995). Dur d’être un héros.

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