LA ISLA MÍNIMA

en VOD

La Isla minima – « l’Ile la plus petite » pourrait-on traduire en français – est le sixième long métrage du cinéaste espagnol Alberto Rodríguez, né à Séville en 1971. On y fait la connaissance de deux policiers très différents, venus dans la région particulièrement inhospitalière des rives marécageuses du Guadalquivir, au sud de l’Andalousie, pour enquêter sur la disparition de deux jeunes filles, un soir de fête foraine.

Parallèlement à cette enquête policière, Alberto Rodríguez dresse le portrait de l’Espagne du début des années 80, c'est-à-dire de l’après-franquisme, une période charnière et complexe qui le taraude et qu’il avait déjà évoquée dans Groupe d’élite, son film précédent.

Sorti en Espagne, fin septembre 2014 (et en France dix mois plus tard), le film que vous allez voir fut le grand vainqueur de la cérémonie des Goya – les Oscars ibériques –, remportant pas moins de dix statuettes, dont celles du meilleur scénario, du meilleur réalisateur et du meilleur film.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver MYSTIC RIVER (2003) (Deux policiers de Boston enquêtent sur le meurtre d’une jeune fille de 19 ans.) ou encore UN HOMME EST PASSÉ (1955) (Thriller tendu se déroulant en 24h mais, également, évocation du sort des prisonniers japonais après Pearl Harbor.).

Javier Gutiérrez (43 ans), alias Pedro l’aîné des deux policiers, obtint, grâce à ce rôle, le Goya du meilleur acteur, mais aussi, une dizaine d’autres récompenses, dont le prix du meilleur acteur du festival international de San Sebastian. Souvent vu au théâtre, c’est pourtant à la télévision, en fidèle écuyer du vengeur masqué de la série télé l’Aigle rouge qu’il devint très populaire dans toute la péninsule. Son partenaire, Raul Arévalo (35 ans), travaille beaucoup pour la télévision mais, aussi, pour le cinéma, où il fut notamment l’un des trois stewards très gays et très joyeux des Amants passagers de Pedro Almodovar, en 2013. Quatre ans plus tôt, il avait, lui aussi, reçu le Goya du meilleur acteur. De son côté, le réalisateur, Alberto Rodríguez, reçut officiellement le titre de « Fils Prodigue d’Andalousie », tant il sut faire de cette région, trop souvent associée à une image touristico-folklorique, l’un des principaux personnages de son film.

En plus de l’Andalousie, et bien que la Isla minima reste un thriller dont l’intrigue lui fut inspiré par la lecture d’un roman du Chilien Roberto Bolano, c’est l’après-franquisme qui fascine Alberto Rodríguez. Baptisées « transition démocratique », ces années qui ont suivi la mort de Franco (en novembre 1975) expliquent, d’après lui, ce qu’est l’Espagne d’aujourd’hui. Cette période « nous a été vendue, dira-t-il, comme une sorte d’instant idéal, nous faisant croire que notre pays était passé des ténèbres au grand jour, en un claquement de doigts ». Evidemment, rien ne fut aussi simple et les rapports entre les deux policiers du film illustrent bien ce mal-être né des silences et des compromissions qu’entraîna la promulgation de la loi d’amnistie d’octobre 1977, censée effacer, sinon oublier, les sombres années.

Réclamée par la gauche, afin d’amnistier officiellement les opposants à la dictature – toujours en prison pour certains –, cette loi, en fait, amnistiait pareillement les victimes du franquisme et ses responsables. C’est ainsi que le jeune policier idéaliste et démocrate déchire la photo compromettant son aîné, ex-membre actif de la police politique de Franco. Mais, effacer le passer et vivre dans le compromis ne satisfait pas Alberto Rodríguez. Plutôt que d’avoir peur de « rouvrir des blessures », déclara-t-il, « peut-être suffirait-il de les soigner ? »

S'il ne brille pas par une intrigue des plus renversantes, La Isla Minima compense en donnant à voir des séquences à la précision chirurgicale, ainsi qu'à la beauté plastique époustouflante. Couplé à la fluidité du récit caractérisant usuellement le cinéma espagnol, ...

La Isla Minima (ou Marshland en France), film Espagnol qui à tout rafler aux Goya 2014. Dans Fargo les frères Coen, le paysage et l'espace enneigé du Minnesota sont primordiaux, tout comme dans True Détective, les champs et la verdure de la Louisiane. Ici, c'est pareil, on ...

La Isla minima s'ouvre sur une voiture immobilisée, en panne sur un chemin de terre, coincé entre les eaux ; puis, avec deux hommes, silencieux, à distance, dont rien n’indique qu’ils sont ensemble ; deux chasseurs aussi, sur la berge, indifférents ; l‘arrivée d’un ...