JOY

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Les plus grandes inventions sont souvent celles qu'on finit par totalement intégrer au quotidien, comme si elles avaient toujours été là. Qui se souvient que derrière la création du balai-serpillère auto-essorant, objet ordinaire s'il en est, il y avait tout un parcours d'émancipation pour son inventrice, Joy Mangano ?

C'est sous cet angle que David O'Russell a voulu explorer, avec Joy, l'histoire d'une femme au foyer devenue femme d'affaires. Cette « success story » renoue avec le rythme et l'esthétique de la comédie hollywoodienne des années 40-50 pour mieux raconter l'époque moderne, du capitalisme familial à l'art de l'entreprenariat comme réussite personnelle.

Quatrième collaboration entre le réalisateur et Jennifer Lawrence (après Happiness Therapy, American Bluff et Serena), Joy, parfait écrin pour l'actrice comme en plaidoyer pour un féminisme actif  est la démonstration parfaite que leur petite entreprise est très loin d'être en faillite.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver BEING THE RICARDOS (Parce que l'actrice Lucille Ball (interprétée ici par Nicole Kidman) est une self made woman, qui avait conquis le coeur de l'Amérique en créant sa propre sitcom.) ou encore LE ROMAN DE MILDRED PIERCE (Parce que Mildred Pierce est une femme au foyer qui se découvre comme Joy un véritable talent pour les affaires. Un classique du mélodrame et du film noir.).

David O'Russell a un rapport singulier avec les tâches ménagères. Il en a même fait une activité inhérante à sa pratique du Zen, faisant du passage de balai ou du récurage de sols un appui pour son bouddhisme. Rien d'étonnant à ce qu'il aie été attiré par le scénario qu'Anne Mumolo a consacré à Joy Mangano, inventrice de plus d'une centaine d'objets – du balai-serpillère auto-essorrant aux cintres antidérapants- avant de devenir la reine du télé-achat américain.

A l'arrivée, Joy n'est pourtant pas le biopic de Mangano. O'Russell a préféré en faire le portrait plus global de femmes prenant leurs vies en main, à partir de multiples témoignages de femmes au foyer s'étant lancées dans le monde de l'entreprise, qu'il a intégrées au scénario, agrémentés de nombreux nouveaux personnages. Il n'a d'ailleurs pas rencontré physiquement Mangano avant d'avoir tourné le film. Pas plus que Joy n'a de nom dans le film, son prénom suffisant à en faire le symbole d'une certaine sororité.

Un sentiment renforcé par le regard porté sur les hommes dans Joy, en particulier, un père et un mari qui soutiennent pleinement ce personnage-titre. Joy étant volontairement conçu comme un film sur une femme accomplissant ses rêves de réussite, quels que soient les obstacles.

C'est en ce sens qu'O'Russell et Jennifer Lawrence, plus collaboratrice que simple actrice sur ce projet ont voulu donner à Joy un aspect de pétulante fable moderne, reprenant certains codes formels des soap operas des annés 50. Un décalage renforcé par l'envie commune  d'un travail différent autour de Lawrence : là où dans leurs trois films précédent, ses personnages étaient de véritables tornades, dans Joy, elle se recentre, est quasiment le seul rôle ne se dispersant pas, qu'elle doive faire face aux contraintes de son foyer ou aux rudesses du business. Autrement dit, ne jamais passer un coup de serpillère sur son objectif.

Aller voir Joy, quitter SensCritique deux semaines puis revenir, c'était un peu comme rentrer à la maison pour découvrir que tes potes ont vidé ta chambre et laissé un mot dans la pièce : "Désolé gars, là c'est sans nous, change de colocs". Tu te sens seul, là haut avec ...

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