LES PISTOLETS EN PLASTIQUE en VOD
- De
- 2024
- 96 mn
- Comédie
- France
- Tous publics
- VF - HD
PARCE QUE
On peut rire de tout, bien sûr. Mais peut-on vraiment rire d'un des faits divers les plus célèbres de France ? Après Apnée et Oranges Sanguines, Jean-Christophe Meurisse a pris le risque du mauvais goût, tout en l'évitant avec brio. Certes, le nom est changé, mais on devine immédiatement de qui s'inspire ce Paul Bernardin, en cavale après le meurtre de toute sa famille. Mais en plaçant ce maigre filtre sur l'affaire Dupont de Ligonnès, le film indique que ce dont il rit n'est jamais le crime, mais la fascination qu'il suscite. Pour ce faire, il s'inspire de l'emballement médiatique de 2019 après l'arrestation d'un homme pris à tort pour l'assassin. Tout le ridicule de l'affaire est ici mis au profit d'une comédie loufoque et grinçante.
Venu du théâtre, Meurisse démontre ici encore son amour pour les acteurs. La mise en scène n'est là que pour accompagner leurs improvisations, poussées jusqu'au bout de l'absurde. Le réalisateur en profite pour faire défiler des seconds rôles de luxe, de Jonathan Cohen à Vincent Dedienne en passant par Aymeric Lompret, Nora Hamzawi ou François Rollin. Qu'il s'agisse d'eux ou des rôles principaux, chacun a droit à son moment de folie, dans un plaisir très communicatif.
Au-delà du pur plaisir de les voir jouer, chacun vient étayer le propos du film sur notre rapport à la violence, et plus largement l'isolement social et l'incapacité à communiquer. Chaque échange est fait de quiproquos, malentendus et agacements. Mais surtout d'une banalité profonde, en décalage permanent avec la violence dont il est question. C'est en faisant craquer cette banalité de surface, pour laisser surgir le côté enfantin et perdu des personnages, que Meurisse nous met face à nos défaillances morales et fascinations morbides.
Car l'humour est féroce, mais ne vient jamais amoindrir la réalité sordide du crime. Si, les personnages, eux, semblent l'oublier à force de vouloir l'approcher, le spectateur est mis face à l'horreur à travers les apparitions sporadiques de Bernardin, joué en finesse par Laurent Stocker. Là, l'humour laisse place à un malaise glaçant et de plus en plus étouffant, alors que s'y joue la même banalité que dans les autres scènes. Chaque retour à la comédie a dès lors un goût étrange. C'est tout le pouvoir de l'humour qui est exposé dans ce film, capable de dynamiter un mythe pour en mettre en lumière la froide violence. En nous faisant éclater de rire au passage.