MODEL SHOP

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En octobre 1967, six mois après la sortie des Demoiselles de Rochefort, Jacques Demy, encore tout auréolé du triomphe international de ses Parapluies de Cherbourg – Palme d’or à Cannes, Prix Louis Delluc, quatre nominations aux Oscars –, est invité au Festival de San Francisco pour une rétrospective Demy-Varda. Il en profite pour retrouver son ami Michel Legrand, installé à Los Angeles. C’est là qu’il va se mettre à rêver d’un film américain, tourné en décor naturel dans les rues et les maisons de la cité des anges.

Un temps baptisé « Lola à L.A. », Model Shop est, en effet, la suite de Lola, le film que Demy avait tourné à Nantes en 1961 avec Anouk Aimée dans le rôle de Cécile, danseuse-entraîneuse à l’Eldorado sous le pseudonyme de Lola. Vous allez retrouver cet attachant personnage, toujours incarné par Anouk Aimée, comédienne française très courtisée par Hollywood depuis l’Oscar d’Un homme et une femme trois ans plus tôt, et qui fait, ici, ses débuts en Amérique.

En huit jours seulement et sans rien connaître du scénario, la Columbia allait signer un contrat qui, en échange de la présence d’Anouk Aimée et du scrupuleux respect du très modique budget, allait bombarder Jacques Demy « producteur-réalisateur », titre ronflant qui allait lui permettre, cependant, d’obtenir, ce qui était exceptionnel à Hollywood mais indispensable pour lui : le « last cut » (on ne disait pas encore le « final cut » !)

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LOLA (1961) (Première partie de la vie de Lola que l’on retrouvera, seule et amère, dans Model Shop.) ou encore LA FEMME PUBLIQUE (1984) (Autre destin d’une femme obligée pour survivre de se laisser prendre nue en photo. Lola veut être chanteuse et danseuse, Ethel veut être comédienne.).

« On peut toujours essayer » ! Ainsi s’achève Model Shop, systématiquement présenté dans la presse française de l’époque comme le « premier » film américain de Jacques Demy. On le sait, cette « histoire d’amour sans amour », comme il la qualifia lui-même, restera son unique film américain. Dans le long entretien qu’il accorda à Michel Delahaye dans les Cahiers du cinéma en novembre 1968, il raconte sa vision d’Hollywood, une industrie vieillissante et ankylosée par l’incroyable pouvoir des syndicats qui, par exemple, l’obligèrent à travailler avec une équipe de quarante techniciens, lorsqu’un seul caméraman aurait suffi, ou avec deux maquilleurs, l’un pour le visage d’Anouk Aimée, l’autre pour ses épaules ! Sans parler de la vétusté du matériel, surtout des tables de montage, vieilles d’une quarantaine d’années et terriblement bruyantes !

Très critique à l’égard du système hollywoodien, qu’il qualifiait de « complètement absurde et faux », Demy reconnaissait, cependant, le grand professionnalisme des techniciens qui l’avaient accompagné et qui tranchait singulièrement avec le manque de rigueur de son interprète principale. « Elle n’a vraiment pas été très professionnelle », avoua-t-il. « Elle arrivait en retard et ne savait pas son texte. Enfin, cela fait peut-être partie de son charme », concluait-il avant de faire l’éloge des autres comédiens, tous « absolument irréprochables ». C’est en le découvrant à la télévision puis dans 2001, l’Odyssée de l’espace, que Demy confia à Gary Loockwood le rôle de George, après que la Columbia ait refusé d’engager celui qu’il avait d’abord choisi, un jeune inconnu de 26 ans nommé Harrison Ford qui, paraît-il, n’avait aucune chance de faire carrière un jour !

Voulant échapper à l’irréalité de ses productions précédentes, Jacques Demy écrivit le scénario, particulièrement pessimiste, de Model Shop en se colletant à la réalité américaine. C’est ainsi qu’il marcha longuement dans les rues de Los Angeles où l’auto-stop palliait au manque de transports en commun et où fleurissaient encore ces sordides boutiques nommées « model shop ». Refusant l’artifice du studio, il y chercha aussi la maison idéale où pourraient loger son héros et sa compagne Gloria. Lorsqu’il la trouva, face à l’océan, à côté de cette bruyante pompe à pétrole, il proposa immédiatement à ses occupants (qui acceptèrent) de l’abandonner telle quelle et de partir vivre quinze jours à l’hôtel !

Film méconnu de Jacques Demy, parenthèse américaine, suite désabusée de Lola. C'est un bonheur de retrouver l'univers poétique du metteur en scène, harmonie de couleurs où les gens s'interpellent dans une douceur omniprésente, malgré les coups de la vie. Un cinéma qui ...

Après une dispute avec son amie Gloria qui lui reproche de ne rien faire de sa vie, George Matthews, architecte de 26 ans au chômage traverse Los Angeles afin d'emprunter de l'argent à ses amis pour payer son crédit automobile. Au détour d'un garage, il rencontre "Lola", femme ...

Le début du film, quoique plaisant, n'est pas tout à fait convaincant. Les dialogues en anglais, écrits à quatre mains, l'absence de la musique de Michel Legrand et des personnages ou lieux qui nous sont étrangers, on a du mal à se sentir chez soi devant le film, qu'on appréhende ...