IMMIGRATION GAME

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Parfaitement ancré dans son époque, Immigration game ose la fable politique violente et désespérée sur la question de l’accueil des réfugiés en Europe. Dans un futur proche, l’Allemagne, après avoir fermé ses frontières, propose en effet aux migrants de gagner la citoyenneté allemande en participant à un jeu télévisé d’une rare cruauté : pour gagner, il faut tout simplement survivre à une chasse à l’homme géante organisée en plein cœur de Berlin.

Véritable thriller anxiogène, le film mêle manifeste politique et action pure, et renvoie chacun à ses propres contradictions. Il dresse notamment un portrait terrifiant de nos sociétés contemporaines individualistes et indifférentes.

Immigration Game s’inscrit ainsi dans la veine de la franchise Hunger games, avec un petit côté American Nightmares qui en renforce l’effroi et la frénésie. En effet, ici, les « candidats » sont seuls contre tous, traqués par des gangs de « chasseurs » professionnels, mais également à la merci de toute personne à qui il prendrait l’envie de les tuer.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver HUNGER GAMES (Un jeu diffusé à la télévision oblige des jeunes gens à s'entretuer pour survivre.) ou encore AMERICAN NIGHTMARE (Pendant toute une nuit, les pires actions criminelles (y compris le meurtre) sont légalisées.).

Immigration game s’inscrit dans le genre du récit dystopique qui s’appuie sur des éléments du réel pour imaginer une société future cauchemardesque ayant poussé les travers de notre époque à leur paroxysme. Ici, il s’agit autant d’aborder la question de l’accueil des réfugiés que la réaction des citoyens face à cette situation sans précédent. Il n’est pas innocent que le film se déroule en Allemagne, l’un des pays européens ayant fait le plus en faveur des migrants, et où montent en parallèle des résurgences du parti nazi, symbolisé dans l’histoire par les gangs de "chasseurs".

Le film offre notamment une réflexion glaçante sur l’absence d’empathie de l’individu face aux drames rencontrés par les autres, tant que cela ne le touche pas personnellement. Il va même plus loin en montrant comment le fléau de l’indifférence se répand, et comment le fait d’ériger la violence en règle conduit toute une société à se radicaliser. Il illustre ainsi à sa manière le concept de "loi du plus fort", qui est ici totalement dévoyée pour donner libre cours aux pulsions les plus animales de l’être humain. A travers le personnage principal, on perçoit la transformation irréversible qu’une expérience traumatique comme celle du jeu (tuer ou être tué) peut opérer sur les êtres même les plus sensés et éduqués.

Mais Immigration game nous place aussi dans la situation des spectateurs du « jeu » télévisé, et fait de nous des complices voyeurs de ce qu’il dénonce. Sa charge contre la soif de sensationnalisme des médias est très forte, et rappelle une œuvre comme The running man de Paul Michael Glaser, qui dénonçait déjà en 1988 les dérives de la télé-réalité à travers un concept de chasse à l’homme meurtrière. Plus près de nous, en 2008, Live ! de Bill Guttentag ne faisait pas autre chose en inventant une sorte de roulette russe géante filmée en direct. En digne héritier, Immigration game semble aller encore plus loin dans le cynisme en proposant une fin à la cruauté assumée, et au pessimisme incommensurable.