MANDIBULES

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C’est l’histoire d’un mec qui s’est endormi sur la plage et qu’un copain vient réveiller en lui proposant de gagner cinq cents boules : une sombre histoire de valise à livrer. Il vole aussitôt une Mercedes - en mode épave - et embarque son meilleur pote et puis une mouche, géante, qui dormait dans le coffre. D’un coup, le ciel s’éclaircit pour les deux morts de faim, qui décident de dresser l’insecte persuadés qu’elle va leur permettre de gagner leur vie…  

On peut ne pas être fan du cinéma de Quentin Dupieux et lui reconnaître une liberté créative unique. Son audace n’a pas d’équivalent car, qui aujourd’hui oserait tenter d’intéresser le public avec une histoire sur le papier si improbable ? Mandibules une comédie loufoque aux contours fantastiques, caractéristique de l’univers du réalisateur.  

En terminant le montage de son précédent long métrage Le Daim, avec Jean Dujardin, Quentin Dupieux dit, dans sa note d’intention, avoir réalisé soudain que tous ses films étaient “des comédies fortement tourmentées par la mort”. Avec Mandibules dit-il, j’abandonne enfin la mort pour m’intéresser à la vie”. Alors approchez et laissez vous gagner par la vie telle qu’elle se dégage dans Mandibules qui selon son auteur “est avant tout une comédie sincère sur l’amitié”. 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver RUBBER (2010) (Parce que rien ne fait plus penser à un film de Dupieux qu'un précédent film de ...Dupieux !) ou encore LA MOUCHE NOIRE (1958) (Signé Kurt Neumann, le premier film où une mouche prend une place démesurée ! (David Cronenberg en fera un remake, LA MOUCHE)).

Eloge inavoué de la bêtise humaine - parfois vecteur d’amitiés sincères ! - Mandibules doit beaucoup à la folie saine de ses deux principaux interprètes, Grégoire Ludig et David Marsais que le public à découvert en 2012 à la télévision dans leur Palma Show. C’est en voyant un de leurs sketches que Quentin Dupieux a eu envie de travailler avec eux. Avec Mandibules il a voulu, dit-il, magnifier le tandem comique “qu’ils forment”, en filmant “leur complicité et leur légèreté avec beaucoup de bienveillance”.

Le réalisateur, qui tient à préciser que l’idiotie “n’est qu’un paramètre de ses films, pousse cependant loin le bouchon en la matière. Depuis Dumb et Dumber des frères Farrelly avec Jim Carrey et Jeff Daniels, on ne se souvenait pas avoir vu plus grands crétins congénitaux que Jean-Gab et Manu. Surtout, dans une ambiance de légèreté inhabituelle chez Dupieux. Rien de mortifère ici. Le cinéaste a confié que Mandibules est “sûrement né sur la pile de cadavres qui jonchaient Le Daim”. Moralité, il a eu envie de faire “un film léger, un film con, vraiment con”, qui sortirait tout seul de sa tête.  

Tous les comédiens sont entrés avec délectation dans la folie calculée de Quentin Dupieux, de Bruno Lochet à India Hair ; avec une mention spéciale pour Adèle Exarchopoulos, dont le personnage, moins perturbé que ne le croient ses amis dans la scène néo-gore du film, est le seul à dire la vérité, mais sans grand succès. Quant à la Mouche, dont les yeux globuleux vous scrutent tout au long du film, elle mixe le travail d’un marionnettiste, pour les plans rapprochés et l’illusion créée en digital pour le mouvement des pattes. Voilà les défenseurs de la nature rassurés. Dupieux n’etait pas du genre à faire du mal à une mouche.

Il est curieux de voir comment le cinéma de Quentin Dupieux a évolué vers une direction nettement de moins en moins radicale, pour aller vers un côté plus grand public. Avant, c'était de l'absurde noyé dans l'absurde. Depuis Le Daim, son précédent film, c'est un élément ...

Mandibules retrouve la capacité d’émerveillement d’un Rubber (2010), la fascination devant le non-sens qui pourtant signifie dans la logique des personnages. Mais mieux qu’un Rubber, Mandibules ne s’enlise pas dans un propos politique – dénoncer le tourisme de masse ...

Titre tiré de la citation de Henri-Frédéric Amiel: "L'idiot n'a point de cervelle, mais il a le croc venimeux" Qu’on aime ou qu’on déteste, il faut bien avouer que le cinéma de Quentin Dupieux ne laisse pas indifférent. Mais même ses détracteurs sont obligés de signifier ...