JULIETA

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Depuis la sortie en 1988 de Femmes au bord de la crise de nerfs, La France est invariablement le pays qui réserve le meilleur accueil au cinéma de Pedro Almodovar. De surcroît, quelques uns de ses meilleurs longs métrages comme Tout sur ma mère (en 1999), ou Volver (en 2006) ont coïncidé avec une sélection à Cannes, facilitant encore un peu plus leur notoriété.

Julieta est son vingtième long métrage. On y retrouve grand nombre des ingrédients qui ont caractérisé les précédents, à commencer par la primeur accordé aux personnages féminins. Mais c’est dans ses sources d’inspiration que Julieta occupe une place à part puisque pour la seconde fois il s’agit d’une adaptation : Almodovar a bâti son script à partir de trois nouvelles de la romancière canadienne Alice Munro extraites de son recueil intitulé Fugitives.

Les trois nouvelles avaient une « Juliette » pour héroïne, mais ne se suivaient pas. Il s’agissait aussi de trois histoires distinctes à partir desquelles le réalisateur dit avoir « inventé ce qui manquait pour qu’elles n’en fassent qu’une." Lorsque se posait la question du lieu de tournage, Almodovar pensait d’abord à New York, travaillant une première version en anglais pour un casting anglo-saxon. Et puis l’Espagne dans tous ses contrastes s’est une nouvelle fois imposée ; et Juliette est devenue Julieta... 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver TOUT SUR MA MÈRE (1999) (Où Almodovar, déjà, s'intéressait à ce que provoque la disparition inacceptable d'un enfant...) ou encore JE VAIS BIEN NE T'EN FAIS PAS (2006) (A la suite d'une dispute, un fils quitte la maison. Son père essaye de comprendre...).

Julieta a donné l’occasion à Pedro Almodovar de renouveler son aréopage de « chicas ». Les deux principales sont nouvelles dans son univers et se partagent comme vous l’avez vu le personnage principal à deux époques de sa vie. La trouvaille, payante, avait du sens puisqu’elle a permis au réalisateur de contourner la difficulté de devoir « vieillir » le personnage par le biais du maquillage, Almodovar n’ayant aucune confiance en ce subterfuge.

La plus jeune des deux, Adriana Ugarte arrivait précédée d’une belle notoriété à la télévision. La seconde, Emma Suarez fut dans les années 80 l’actrice fétiche de Julio Medem, autre grand réalisateur espagnol. Une troisième actrice sert de trait d’union avec le prestigieux passé du réalisateur : Rossy de Palma. C’était la septième fois que l’actrice madrilène figurait au générique d’un film de son Pygmalion.

Sur le fonds, ce qui fait de Julieta un film différent de ses précédents réside dans le fait que son personnage central est une femme qui subit les événements. Elle n’est pas explosive, viscérale, électrique, en rébellion comme l’étaient les personnages de Carmen Maura, Victoria Abril ou Penelope Cruz. Toutes se dressaient contre une société de convenances machistes mues par la nécessité d’y survivre. Leurs colères étaient aussi celles du cinéaste, vibrant défenseur du sexe dit faible. Le moteur de Julieta n’est ainsi pas la colère, mais la mélancolie, qui teinte le film de sa couleur si particulière.

Cette soixante-neuvième édition du fameux festival de Cannes nous a largement, et peut-être même immodérément, vendu Julieta comme étant ce qu'on pourrait considérer comme non moins que le grand retour d'Almodóvar dans cette dispendieuse arène que l'on nomme septième ...

J'écris rarement de critique pour évoquer la passion que je porte à un film, mais là je me dois de le faire. Car Almodovar et moi c'est une grande histoire d'amour, comme celle que l'on ne voit qu'au cinéma. Cette flamme elle a commencé a brûler durant l'adolescence, quand ...

Le hasard veut que le dernier film que j’ai vu d’Almodovar soit La mauvaise éducation, soit il y a douze ans. Douze ans de silence, d’une rupture passive (quatre films ignorés) mais sans regrets, soit précisément ce qui caractérise la relation de Julieta et sa fille. ...