VINCENT, FRANÇOIS, PAUL ET LES AUTRES (VERSION RESTAURÉE)

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Il a fallu bien du temps pour que Claude Sautet s’impose comme un cinéaste majeur. Après avoir été assistant sur des films souvent secondaires, après avoir collaboré au scénario de films pas toujours dignes d’intérêt, il est passé à la mise en scène et a signé deux très beaux polars dans les années 60, avant de prendre une autre route dans les années 70, celle de drames sentimentaux qui seront souvent taxés de bourgeois, au motif qu’ils mettaient en scène des bourgeois.

C’était évidemment idiot, mais si Sautet avait clairement le cœur à gauche, il avait aussi le désir de brosser le tableau d’une société qui n’avait rien de révolutionnaire, mais dont l’inquiétude pouvait trouver un écho en chaque spectateur. Il terminera sa carrière dans les années 80 et 90 par une trilogie très mélancolique, presque dépressive. Ses plus grands films sont ceux des années 70, tel Vincent, François, Paul et les autres, qui reste par ailleurs son plus grand succès public. Sans doute parce qu’ils sont un reflet à la fois subtil et clairvoyant de la France pompidolo-giscardienne. Comme on disait alors…

Vincent, François, Paul et les autres est un film qu’il serait difficile d’attribuer à un autre qu’au signataire des Choses de la vie. Les mots de Dabadie, la musique de Sarde, la manière sans ostentation mais avec beaucoup de tendresse pour les personnages de mettre en scène dénotent que c’est bien Sautet qui est derrière la caméra. Sans oublier tous ces scènes que le cinéaste affectionne, les amis réunis autour d’une bonne table, les cafés comme lieux d’échanges, les cigarettes incessantes, les mots d’amour qui brûlent les lèvres, etc.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver FEMMES DE PERSONNE (Un autre film choral sur les relations entre hommes et femmes) ou encore LA MER À BOIRE (Ce film raconte le naufrage d'un patron de PME).

Claude Sautet a toujours mis beaucoup de lui-même dans les films qu’il a mis en scène. Beaucoup ont fait remarquer que Michel Serrault était physiquement comme un double du cinéaste dans Nelly et Monsieur Arnaud, l’ultime opus du réalisateur. De la même manière il est évident que Vincent, François et Paul, tous quinquagénaires, sont les porte-parole du cinéaste, qui lui aussi frise la cinquantaine quand il tourne le film qui leur donne vie. La cinquantaine est un âge où l’on peut encore se bercer d’illusions, mais qui sonne malgré tout l’heure des premiers bilans. L’heure où l’on s’aperçoit que l’amour ne rime pas nécessairement avec toujours. Celle où il faut bien admettre que la réussite professionnelle n’est pas garantie. Quand, en prime, les premiers soucis de santé se pointent à l’horizon.

Pour incarner ces quinquas au bord de la crise de nerf, Sautet a fait appel à des valeurs sures : Michel Piccoli, qu’il avait déjà dirigé dans Les Choses de la vie et Max et les Ferrailleurs, Yves Montant qui avait apporté tout son allant à César et Rosalie, et Serge Reggiani, petit nouveau dans la bande, mais qui n’a pas à rougir de la comparaison avec les deux autres. Gérard Depardieu n’est évidemment pas de la même génération, mais il incarne un jeune pour qui l’avenir est déjà incertain, et dont la situation sociale n’a pas le brillant de celle de ses amis. Comme une incarnation de la crise économique qui s’annonce et sonne le glas des trente glorieuses.

On aura compris que le film est un film d’hommes. Comme souvent chez Sautet d’ailleurs. Mais si les femmes restent le plus souvent dans l’ombre de leurs moitiés, il est clair que ce n’est pas parce que Sautet ne leur accorde qu’un intérêt mineur. Au contraire. Quand les hommes font part de leurs doutes et de leurs faiblesses, même s’ils font mine de rouler les mécaniques, les femmes savent se montrer fortes. La femme de Vincent, qu’incarne Stéphane Audran sait faire preuve d’empathie pour son mari volage quand celui-ci se retrouve seul et endetté. Et celle de François ne se lamente pas sur son sort d’épouse délaissée, préférant jouer les affranchies. Mais les films de Sautet, et celui-ci ne fait pas exception à la règle ne se contente pas de brosser des portraits individuels, le cinéaste sachant mettre ses personnages en relation, pour faire vivre des groupes humains avec une maestria sans pareil.

Comme on se sent bien chez Claude Sautet, qu’on les aime tous ces personnages si humains, si fragiles et proches de nous. On se sent en famille dans ces films, entre amis de trente ans. Claude Sautet avait le don de voir ce qu’il y a de profondément touchant en chacun de nous, ...

C'est un rituel bien précis, chaque fin de semaine, Vincent, François et Paul, tous trois la cinquantaine, se retrouvent à la campagne avec d'autres, notamment le jeune boxeur Jean, pour boire, manger ou encore discuter. Claude Sautet nous donne tout simplement l'impression ...

Dans la collaboration Sautet-Néron-Dabadie, Vincent, François, Paul et les autres porte au sommet cette absence d’ambition scénaristique au profit d’un tableau de mœurs découpé dans une époque. Débarrassée des procédés du polar de Max et les ferrailleurs, moins acérée ...