PACIFICTION - TOURMENT SUR LES ÎLES

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Huitième long métrage du plus francophile des cinéastes ibères, Albert Serra, Pacifiction : Tourments sur les îles est un voyage empoisonné dans la Polynésie française, à la frontière du thriller politique et de l'essai poétique. Un film très différent dans la filmographie du réalisateur, plus habitué aux longs métrages en costumes. 

Sur l’île de Tahiti, en Polynésie française, le Haut-Commissaire de la République De Roller, représentant de l’État Français, est un homme de calcul aux manières parfaites. Dans les réceptions officielles comme les établissements interlopes, il prend constamment le pouls d’une population locale d’où la colère peut émerger à tout moment. D’autant plus qu’une rumeur se fait insistante : on aurait aperçu un sous-marin dont la présence fantomatique annoncerait une reprise des essais nucléaires français. 

Avec cette menace en fond, le film déploie son ambiance pesante, aux paysages grandioses, entre cieux flamboyants et mer turquoise. Et au milieu, l’homme au costume blanc : Benoît Magimel, impérial et pourtant un peu trash. Un rôle qui lui a valu son deuxième César du meilleur acteur après De son vivant d’Emmanuelle Bercot en 2022.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver L'ORDRE ET LA MORALE DE MATHIEU KASSOVITZ (La relation compliquée, conflictuelle, entre la métropole et la Polynésie est également au centre du film) ou encore INDIA SONG DE MARGUERITE DURAS (Les deux films se déroulent dans le contexte d'une colonisation).

Au départ, l’envie de Pacifiction est venue par le désir d’Albert Serra de filmer la France, mais pas Paris, qu’il trouve trop commun dans l’univers cinématographique, dont l’univers bourgeois et les terrasses de café ont déjà assez peuplé nos imaginaires. C’est là que lui est venu l’idée d’aller vers les îles. Tahiti? Après tout pourquoi pas. Pour écrire son scénario, il s’est inspiré des souvenirs de Tarita Tériipaia. Tarita a été pendant dix ans la femme de Marlon Brando, qu’elle a rencontré sur le tournage des Révoltés du Bounty (1962), où elle tenait l’un des rôles principaux. Dans ses mémoires, elle parle de sa vie avec l’acteur, mais aussi de son enfance. Il y a aimé les contrastes, d’une part entre la pureté de son enfance à Papeete et la présence parfois nocive des Occidentaux, d’autre part entre cet éden et l’arrivée d’une équipe de tournage hollywoodienne. La rencontre entre paradis et corruption réelle est au cœur du film. 

Pour imaginer son personnage de Haut-Commissaire de la République, De Roller, que le spectateur ne quitte pas, du début à la fin du film, Albert Serra  s’est inspiré d’un personnage de la littérature : le Comte Mosca, de La Chartreuse de Parme de Stendhal. Pour le cinéaste, c’est « une créature un peu cynique, un politicien de l’Etat de Parme qui est toujours dans l’ambiguïté de la manipulation ». Au final, De Roller l’est bien moins, tant ses inquiétudes et ses objectifs sont flous au travers du film, pour mieux suivre le chemin de ses pensées, qui ne sont jamais en avance sur celles des spectateurs. Pour cela, le réalisateur est allé cherché du côté de Jack Nicholson dans le Chinatown de Roman Polanski. 

Pour son De Roller, Albert Serra a immédiatement pensé à Benoît Magimel qu’il avait rencontré quelque temps auparavant lors du Festival de Cannes. Ensemble, et avec le reste de l’équipe, ils ont embarqué pour un tournage de 25 jours en août 2021, alors que Tahiti était sous confinement total. Comme une impression d’île vide qui n’a fait que contribuer à l’ambiance étrange et unique de Pacifiction.

Comme India Song, Pacifiction, « Tourment sur les îles » en français, commence par un coucher de soleil en générique. Ce crépuscule marque bien sûr la fin d'une ère. Dans India Song la bourgeoisie coloniale se réfugiait dans leurs appartements, cages dorées, pour ...

Une île, au loin : le nouveau récit d’Albert Serra embarque le spectateur dans un lieu paradisiaque, Tahiti, avec la ferme intention de lui en faire mesurer la distance. Le film sera donc à vivre comme un expérience hors-norme, de celle qu’on ressent lorsqu’on se rend ...

Albert Serra offre un film merveilleux. Entre le côté thriller paranoïaque, où le héros doit enquêter pour savoir si sa hiérarchie lui ment, le fait que ça se passe en Polynésie avec un spectre colonial et Benoît Magimel qui a sans doute hérité de son meilleur rôle, ...