ASPHALTE

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Samuel Benchetrit avait écrit le scénario d’Asphalte après le tournage de J’ai toujours rêvé d’être un gangster, mais il s’était engagé à tourner Chez Gino avant de pouvoir s’y consacrer. Après, il n’a pas trouvé de financement. Et il est allé tourner dans son coin Un voyage qu’il a produit lui-même avant de trouver de nouveaux producteurs qui eux se sont emballés pour Asphalte et cette confrontation de trois duos inattendus dans le même immeuble de banlieue.


En fait, deux de ces trois histoires sont adaptées des nouvelles réunies dans Chroniques de l’asphalte que Benchetrit a écrites en 2005. La troisième est l’histoire de la comédienne qui vient s’installer dans cet immeuble « J’avais envie de raconter la banlieue différemment à travers des personnages qu’on n’a pas l’habitude de voir quand on aborde ce sujet », raconte le cinéaste qui résume son film comme trois histoires de chutes (du ciel, d’un fauteuil roulant et de son piédestal). Selon le principe que ceux qui tombent peuvent ensuite être récupérés. Une idée qui tenait au cœur de Benchetrit qui a grandi en banlieue et a pu y mesurer la force de la solidarité.


À cause du report du tournage, Benchetrit a dû changer de directeur de la photo. Pierre Aïm a ainsi rejoint l’aventure seulement deux semaines avant le début des prises de vues. Mais habitué à travailler avec Benchetrit, il n’a pas eu besoin de beaucoup échanger avec lui. L’étroitesse des décors interdisait le choix du scope. Mais le cinéaste a radicalisé son choix en optant carrément pour le format carré 1.33

 
Dans le même genre vous pouvez trouver L'IMMEUBLE YACOUBIAN (Plusieurs destins se croisent dans un même immeuble) ou encore LA HAINE (Un autre film de banlieue éclairé par Pierre Aïm).

D’emblée Benchetrit a voulu pour son film Valeria Bruni-Tedeschi et Michael Pitt. Ce dernier lui a tout de suite donné son accord, peut-être influencé par le prix que Benchetrit avait remporté à Sundance pour J’ai toujours rêvé d’être un gangster. Quant à Valeria Bruni-Tedeschi, Benchetrit la voulait dans son film parce qu’il était sûr qu’elle saurait faire vivre son personnage en très peu de scènes, apportant « sa beauté, son excitation, son malaise » à chacune de ses apparitions. Le choix d’Isabelle Huppert est la matérialisation d’un rêve qu’avait le cinéaste depuis longtemps. Et il avoue avoir été totalement séduit par l’investissement artistique de la comédienne.


Le rôle de Gustave Kervern avait été initialement prévu pour Jean-Louis Trintignant qui a dû y renoncer pour des raisons physiques. Ce qui a conduit Benchetrit a réécrire le rôle pour quelqu’un de plus jeune. L’idée de faire jouer son fils Jules était celle de ses producteurs. Mais dès les premiers essais, le cinéaste s’est laissé convaincre et il ne l’a pas regretté. Tassadit Mandi était en fait la connaissance d’une connaissance. Benchetrit a retrouvé en elle le regard malin, la douceur et la détermination qui existaient dans la vraie personne qu’il a connue et qui lui a servi de modèle.


Selon Benchetrit, Asphalte est son film qui lui ressemble le plus. C’est aussi son film le moins bavard. « J’avais envie de montrer ce lien invisible entre les gens, fait de silences et de regards. Mes personnages sont de vrais solitaires et n’ont a priori aucune raison de parler à d’autres », explique-t-il. Et d’ajouter qu’avec l’expérience, il parvient à exprimer ce qu’il veut dire en moins de mots. De même, Benchetrit a impitoyablement coupé au montage tous les plans trop explicatifs de l’humeur de ses personnages. Il ne voulait pas surligner ce que les plans-séquences, les silences et la musique originale de Raphaël expriment d’eux-mêmes. 

Je crois que c'est pour ça que j'aime tant regarder les gens plutôt que mon livre lorsque je prends le bus pour quitter le travail. Avant, je ne faisais que lire, partout et tout le temps, une minute ou une heure devant moi. Maintenant, je regarde les gens. J'observe un vieillard ...

La scène d'ouverture est hilarante et pourtant ce film m'a fait pleurer. Comme souvent pour les oeuvres qui me renversent, Asphalte est à la croisée des genres : à la fois excellente comédie aux situations désopilantes jouées avec un naturel désarmant et fable moderne ...

Début du film : du béton, gris, en 4/3. Une image qui paraît déprimante, isolée, un peu glauque. Puis vient la première scène du film, tout aussi grisonnante mais décalée, drôle par le sérieux déprimant du personnage. Le film baigne encore dans une ambiance réaliste. ...